Ce film reste un classique de la SF des années 50, un an avant Planète interdite, et un modèle du genre, avec mutants horribles, extraterrestres humanoïdes, planète inconnue et soucoupes volantes, il accuse évidemment son âge avec un côté ultra kitsch ; cependant, je le trouve un peu surfait et pas entièrement élaboré pour être crédible, il y a un petit côté théâtral dans tout ça. Revu après tant d'années, je m'aperçois que son côté merveilleux n'est pas suffisant pour me faire rêver ; je me souviens l'avoir découvert à la Dernière Séance en seconde partie de soirée, à cette époque, il m'avait ravi car j'étais encore très jeune, c'était de la SF naïve avec ses mutants Métaluniens au cerveau hypertrophié, à la face insectoïde et aux pinces de homard en guise de mains qui rappelaient les vieux monstres des pulps des années 30 et 40 du genre Amazing Stories ou Wonder Stories.
Le film ne possède ni le charme et le mystère de Planète interdite, et son scénario est moins intéressant que celui de le Jour où la Terre s'arrêta qui était une allégorie politique, de plus ce type de science-fiction était jugée à Hollywood comme un genre inférieur, destiné aux ados des drive-in et aux geeks. C'est pourquoi les studios n'y allouaient pas des budgets conséquents, on ne retrouve ici aucun acteur vraiment connu, si l'on excepte Faith Domergue, actrice spécialisée dans la série B western et fantastique.
Ca explique aussi peut-être pourquoi Jack Arnold, à qui l'on doit certains des meilleurs films fantastiques de Universal à cette époque comme Tarantula, l'Etrange créature du lac noir et surtout l'Homme qui rétrécit... a contribué à la fin du film, mais sans être crédité au générique, le studio Universal n'étant pas satisfait du boulot exécuté par Joseph Newman, réputé plus habile dans le western.
Malgré toutes ces réserves, les Survivants de l'infini est riche en découvertes, et la qualité des effets spéciaux et des couleurs lui donnent un intérêt certain que ne possédait pas la production de SF des années 50. C'est dans la dernière demi-heure qu'on y voit un véritable festival d'effets ; on y voit notamment bien avant la Guerre des étoiles un vaisseau spatial voler vers la caméra et passer au-dessus de l'écran, je gage que George Lucas a dû s'en inspirer pour sa séquence d'ouverture. C'est pourquoi on peut considérer ce film comme la première aventure sidérale hollywoodienne, la description de la planète Métaluna étant très intéressante, en visant un dépaysement assuré.
Etrangement, l'histoire commence comme un film d'espionnage et s'achève comme un authentique film de science-fiction, la première partie jouant habilement sur une certaine ambiguïté, on ne sait s'il s'agit d'espions ou d'extraterrestres, et sont-ils amicaux ou belliqueux ? que veulent-ils faire en récupérant de l'uranium sur Terre ? Le film répond à toutes ces questions et reste une oeuvre soignée, dont le sujet est en fait, plus ambitieux qu'on ne pourrait le croire au premier abord. Il faut simplement le voir avec des yeux indulgents en ne cherchant pas à le comparer aux productions modernes débordant de CGI ; sa teneur et ses effets font tout son charme rétro.