Les Inconnus à l'ère 2.0: un retour faisandé
Difficile de revenir après dix neuf ans après pour raconter la suite des trois frères suite au succès populaire que le trio comique a connu. Difficile de retrouver le feu sacré qui avait conquis une génération dans les années 90, férue des Inconnus et de leur style alors innovant. Entre temps, Campan,Bourdon et Légitimus ont essuyé des problèmes de droits avec leur producteur, réorienté leurs carrières personnelles au cinéma ou à la télévision pour se façonner des respectabilités artistiques différentes. Voilà pour le contexte factuel et temporel qui a conditionné ce retour faisandé. Ayant beaucoup d'affection pour ces trois gars issus du café-théâtre, je suis navré de ce qui leur arrive mais vais quand même vous exposer ce qu'ils ont réussi à faire dans Les trois frères, le retour, pour souligner que leur dernier bébé n'est pas complètement à descendre, vu leur expérience du métier.
De façon trés surprenante, les Inconnus n'auront pas de répliques cultes dans ce film.A mon sens,les rares éclats de rires qu'ils suggèrent le sont au niveau visuel (ouvrez bien vos mirettes).Ce qui se ressent également pendant le film, c'est que le trio a misé sur le comique de situation, véritable marque de fabrique. La présence de Sarah, fille de Bernard débarquant de la banlieue de Lyon, permet alors de développer des scènes efficaces entre les trois compères et elle vu leur décalage social. Les seconds rôles (la mémé,le notaire de "Sharks", "Vaselin", la grand-mère de Sarah,campée par Biyouna) permettent également de renouveler à minima l'univers des Inconnus. Sans leur apport, le film ne respirerait pas et serait confiné aux redites scénaristiques et au parallélisme outrancier des situations ( cf le Millionnaire qui dégénère, le mauvais trip des frangins et les déguisements grossiers qui sont revisités).
Au niveau du devenir de Bernard,Pascal et Didier, je suis vraiment consterné. Même si ces trois mecs sont des bras cassés, le côté récupérable de ces losers passe au dernier plan. Dans les Trois frères, le côté émotionnel (grâce à Michaël, le petit garçon balloté) avait conquis les spectateurs dans ce sens. Ici, je dirais que le cynisme ambiant de notre époque a convaincu les Inconnus de reformater les Trois frères,le retour pour ne pas passer pour des has been. C'est à double tranchant. Le côté positif, étant que le film est ancré dans notre réel ultra speedé où naïveté et bons sentiments sont dévalués. Le côté négatif, étant que les galères répétées des personnages ne montre guère plus le petit rayon de soleil qui les sauve de la médiocrité ou de leurs bassesses maladives. En cela, je ne vous indiquerai pas de scènes ( dont l'impact varie d'un spectateur à un autre) car elles font écho à mon point de vue sur cette ambiance finalement voulue et calibrée pour un public plus jeune.
Pour finir, je serai honnête en disant que la fin dessert le film car elle introduit des personnages potiches dont le contrepoint est un clin d'oeil trés léger aux personnages principaux. Si vous avez apprécié les Inconnus d'avant, ne vous déplacez pas pour ce film. Si vous voulez constater les choix artistiques et scénaristiques du trio, allez y en ne perdant pas de vue que leurs promos télé étaient annonciatrices d'un malaise par rapport à leur futur don au public.