Tout commence par une introduction où se mêlent carte de France et animation présentant rapidement la situation d'époque. Rien de farfelu. Rien qui pourrait nous préparer à ce qui va suivre.
Venise. Une ambiance, des costumes, un visuel aux doux relents d'Assassin's Creed. C'est alors que me revient à l'esprit une question ô combien cruciale et délicate: comment diable un mec comme Paul W.S. Anderson a-t-il pu rassembler une telle brochette d'acteurs avec un pitch pareil, et sachant que ce serait lui aux commandes ? L'industrie du cinéma se porte-t-elle si mal, que des acteurs, parfois même très en vue, se retrouvent à devoir ramer dans ce genre de productions pour pouvoir boucler leur mois ?
Mads Mikkelsen, qui décidément se plaît en borgne. Christoph Waltz, presque effacé - à vrai dire je ne sais pas si c'est un véritable coup de mou de sa part sur ce film, ou si son jeu sobre est tout simplement noyé sous le plus beau surjeu adopté par le reste de la distribution. Un Richelieu en ces riches lieux, que l'on ne mettra pas en valeur, ou si peu. Luke Evans, jamais loin quand ça barde. L'excellent Ray Stevenson, dans un rôle aussi fin que celui qu'il avait dans Rome. Orlando Bloom, qui l'espace d'un film, se prend pour une sorte de Jack Sparrow-glam-steampunk. Et les autres, comme James Corden (Planchet), le ressort comique du personnage gras gauche qui fait des clin d'oeil et tente désespérément de faire rire le spectateur impassible. Un clown proximiteux, en quelque sorte. Et puis surtout, il y a Milla of course, Madame Anderson, que son mari de réalisateur aura tout loisir d'admirer et filmer sous tous les angles, parée de robes aux froufrous amovibles histoire d'avoir son quota de boobs. Milla(dy) en mode Resident Evil tout du long ou presque, agile, surpuissante. Elle saute, virevolte et galope dans tous les sens. Pour reprendre notre Sardou national, elle court, elle court, la Milady d'amour...
Au milieu de tout ça, un D'Artagnangnan version zéro charisme. L'histoire d'un gars con gascon, garçon intrépide et prétentieux qui se lancera sur les traces de son père (en le laissant à la maison, paye ton paradoxe). Sur sa route il rencontre donc ses trois futurs acolytes, un peu has been. Ensemble ils se maquillent et deviennent le groupe Kiss. Non, c'est pas vraiment ça, mais je crois que j'aurais préféré en fait, tant ce qui s'ensuit n'a ni queue ni tête. La première partie, la rencontre, les présentations, tout est assez attendu, pourtant ça marche pas trop mal si on n'est pas trop regardant et qu'on sait pourquoi on est là. Mais d'un coup, sans trop savoir pourquoi ni comment (enfin si, on sait très vite comment...), Paulo passe en roue libre, à croire qu'il a fumé la mo(us)quet(te). Un contexte historique, des lieux symboliques, n'importe quel truc exploitable pour donner de l'épaisseur, de l'enjeu à ce Three Musketeers ? Why bother ?! A la place, il a décidé de jouer la surenchère. Comme d'habitude, en fait.
Au menu donc, grosses explosions de partout, bateaux volants et combat naval qu'on croirait tout droit sortis de Skies of Arcadia (mais en cgi souvent dégueulasses) pendant un long moment, lance-flammes de la mort, armes à feu lourdes (à un moment - entre deux micro-siestes - je me suis même demandé si Sly allait débarquer avec ses potes tellement c'était abusé), du plongeon improbable, des pièges ultra-modernes à la Resident Evil/Cube, un final avec un faux twist et l'annonce d'un round 2. Bref, c'est le festival du grand nawak - on peut presque parler de génie à ce niveau - et un véritable pillage d'art (vidéoludique notamment). Le pire, c'est ce sentiment que Paulo s'est escrimé à nous offrir des scènes de combats à l'épée dignes de ce nom. Et elles le sont. Plusieurs séquences d'action sont d'ailleurs vraiment bien fichues. C'est généreux (générique ?) mais un peu vain.
Ou alors, allez savoir, Paulo a peut-être juste vaguement surpris une conversation sur Les Trois Mousquetaires un jour, et a souhaité rendre un pétaradant hommage à cet Alexandre du mât...