Les yeux de Julia n'est même pas le meilleur film de genre espagnol de ces dernières années, il est dans la moyenne. Une très bonne moyenne. Une excellente moyenne. Une moyenne qui fait baver et fout pépère la honte au cinéma de genre français.
Des films de genre comme ça, avec une réalisation intelligente et stylisée, sensitive, dans notre beau pays on en a genre jamais comme ça, aussi solides, aussi riches. Jamais.
Oui, Los Ojos De Julia est une petite bombe comme seul le cinéma de genre espagnol en propose. La recette commence à être connue, et a certes donné de plus grands films mais elle est ici encore une fois parfaitement exécutée: un film honnête, généreux et riche en sens. Une intrigue à la mécanique parfaitement huilée qui sert des personnages consistants et qui effectuent un parcours émotionnel prenant. Mais bordel, que demande le peuple?

Produit par Del Toro, mettant en vedette l'actrice principale de L'Orphelinat (Belen rueda, très belle femme), Los Ojos de Julia fait parfaitement plonger le spectateur dans le point de vue de son héroïne qui perd peu à peu la vue. L'enjeu cinématographique est tenu haut la main, le handicap du personnage principal amène une dimension inédite et palpitante pour le spectateur, fasciné par la nécessité de l'héroïne à se repérer dans l'espace autrement qu'avec la simple vue, en se raccrochant à ses autres sens et à son intelligence pour survivre. En jouant avec les points de vues et les artifices visuels, la réalisation amène un vrai suspens, un vrai malaise et quelques putains de moments de flippes. De manière fort appropriée, le réal reprend quelques tics propres au Giallo, que ce soit le point de vue subjectif du tueur qui s'avance et s'infiltre en douce, ou le graphisme violent et glauque des meurtres. Le film est bourré de petites idées qui marchent du tonnerre.

En filigrane, le film développe une réflexion incisive sur la vue. La vision et ce qu'on en construit, notre rapport au monde, à l'autre. C'est cet ensemble qui nous définit, comme le montre la séquence finale, climax émotionnel d'une classe absolue. Un ultime plan qui ne réfute pas l'amertume de la tragédie à venir, mais qui préfère coûte que coûte aller chercher le grandiose. Un geste cinématographique qui colle avec la profession de foi du cinéma de genre espagnol: malgré les épreuves traversées, on s'attache avant tout à sonder l'âme humaine et à s'émerveiller coûte que coûte. Dans le final des Yeux de Julia, poétique au possible, on découvre que quelque part l'infini est bien compris dans l'Homme.
Dalecooper
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le 21 févr. 2012

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