Une famille de Tsiganes arrive dans un village dont le maire est interprété par Marc Lavoine et l'institutrice/résistante par Marie-Josée Croze. Ils se heurtent aux lois de Vichy qui interdisent le nomadisme. Divisés, ils décident de rester sur place, en vivotant avec la musique des bals. Mais à plusieurs reprises, ils manquent d'être déportés. La première fois le maire s'arrange en leur vendant un bien immobilier pour les faire sortir. Mais lui-même et l'institutrice sont victimes d'une dénonciation.
Un film un peu long, mais qui réussit très bien ce qu'il se propose de faire : donner une représentation au génocide des Tsiganes, ce terrible angle mort de la folie hitlérienne. Il le fait sans grandiloquence, en s'attachant au quotidien de ces Tsiganes dans leurs roulottes en bois. On a donc une succession de saynettes liées à leur volonté de survivre, avec le fil rouge de leur confrontation avec les autorités.
On s'attache moins au chef du groupe qu'à Taloche, un marginal dégingandé à moitié fou qui s'investit beaucoup (trop ?) dans le rôle du Tsigane vagabond truculent. Une sorte de bouffon shakespearien.
La reconstitution est sobre mais juste, avec de beaux extérieurs de sous-bois, de lande, de chemins de campagnes, de salle de classe de la IIIe République. Les éclairages, les cadrages, le montage sont très travaillés : c'est de la belle ouvrage. La direction d'acteurs concernant les Tsiganes est très réussie. Marc Lavoine ne joue pas super bien mais ça ne se voit pas trop.
C'est clairement une oeuvre de mémoire, qui rend hommage par la bande à la culture gitane : les hérissons ramassés, la vente de paniers, les galères sur la route, les rituels étranges pour guérir d'un coup de sabot, la difficulté à se scolariser, l'unité du sang. La musique, bien sûr. Le film parle peu de la condition des femmes (la séparation stricte des sexes dans les campements, l'importance de la virginité), ce n'est pas le propos.
Il y a quelques longueurs, et je n'ai pas compris le rôle du gamin seul dans la narration, sinon d'être un prétexte à l'exposition.
Ha, et très beau générique de fin chanté par Catherine Ringer.
C'est le premier film de Tony Gatliff que je vois et je compte en voir d'autres, tant ce sujet m'intéresse et me semble ici traité de manière élégante et juste, à de légères longueurs près.