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Huis clos minimaliste, Settlers aborde, avec une économie de moyens digne d'un Mies van der Rohe, nombre des thèmes qui font la Science fiction. Le scénario post apocalyptique (numero 1342, comme dirait Moebius). La Terre brulée. La conquête et la terraformation de Mars. Le conflit entre les deux planètes, probablement dû à une prise d'indépendance de la colonie. On a un dôme martien, une atmosphère créée et perdue. Une IA qui se prend à développer des émotions, transgressant au passage les lois d'Asimov (qui n'ont, en tant que telles, que vocation à l'être). On a même droit à l'extinction de l'espèce humaine en point de mire.


Ce qui fait la particularité de Settlers, c'est son approche stylistique. Nul recours à armadas s'affrontant à coup de torpilles, de lasers ou d'ogives sur fond noir et pointilliste. Tout cela s'est déjà passé. Et c'est au fil des dialogues, avares, que l'on apprend le monde, avec Remmy, née dans cette ferme de pionniers hors du temps.


Les trois chapitres font chacun le portrait des seuls humains à qui Remmy aura parlé au cours de sa vie. Ils distillent au goutte à goutte d'intangibles indices sur l'extérieur. Loin d'asséner de laborieuses explications en prenant le spectateur par la main, Wyatt Rockefeller lui demande au contraire d'assembler le puzzle. Chaque pièce n'est dévoilée qu'une fois voire seulement suggérée. Ce mode operatoire nous renseigne déjà sur les intentions de l'auteur : il ne vise clairement pas le grand public. J'enfonce là une porte ouverte, puisque de scène d'action il n'y a quasiment pas. Non, Settlers serait plutôt un Stranger Than Paradise martien et d'ailleurs, c'est au festival de Tribeca, celui des productions indés, celui des Jarmush et consorts, des intellos diront d'aucuns, que fut présenté Settlers.


Je suis tombé par hasard sur Cosmic Sin il y a peu. Unanimement nullissime, on lui a reproché probablement avec raison de refouler hors champs tout événement susceptible de susciter une scène d'action. Par souci d'économie budgétaire sûrement, le but étant surtout de filer son cachet à Bruce Willis qui devait des thunes à l'IRS ou à une pensionnaire de l'aliment.
L'économie de moyens de Settlers est avant tout un choix esthétique et narratif. La violence qui fut à l'origine de la situation dans laquelle se trouve Remmy a voyagé. Ce ne sont pas des vaisseaux, dont on ne connaît pas l'equipage, qui explosent dans le vide. Il n'y a pas de grand vilain que l'on se réjouit de voir crever. Les victimes sont des personnes, avec qui nous avons passé un moment. Et l'incarnation de la violence est un homme, un survivant, vétéran qui a sans doute eu la sagesse de déserter, quoique trop tard pour ne pas porter en lui le germe du meurtre et du viol. Alors même qu'il est probablement sincère quand il se veut protecteur.


Sa fin soulage mais aussi interroge : n'était il pas parmi les derniers porteurs de gamètes ? Si Remmy, liberée, s'en va enfin voir le monde, la conséquence est peut-être une extinction de la violence, mais par le vide.


Si ce film est aux antipodes du space opéra , il reste pour moi de la bonne SF. Je dirais même une SF qui a mûri. Une SF qui ne fait pas dans la surenchère d'effets spéciaux, de pathos, de spectacle. Qui pourrait tenter de penser l'humain, dans tout ça. Et qui a osé le mariage avec Jarmusch, que, fans de SF, nous connaissons aussi.

Kinovor-Cinefaj
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le 14 juil. 2021

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