R. Rossen sait explorer les intérieurs, comme il l’a démontré dans L’arnaqueur.
Ici, à l’image du The Servant de J. Losey, a lieu un retournement de situation, ou plutôt un revirement de position, un échange des rôles au bout duquel le soignant devient malade, et vice-versa, après avoir été insidieusement conquis puis dominé par la patiente. Rossen s’éloigne ainsi des clichés psychologiques des films d’alors, évitant les caractérisations simplistes en montrant la complexité du personnage de Vincent (un très bon Warren Beaty), homme fort, plutôt sûr de lui, ancien combattant, mais lui aussi (comme tout le monde en fin de compte) ayant ses propres failles, ses brèches internes dans lesquelles il peut sombrer en un instant ; car telle est la fragilité de l’âme humaine.
Avec des plans osés formellement, comme ces surimpressions et autres fondus enchaînés traduisant bien les tourments intérieurs des personnages, ou encore ces scènes étourdissantes de rires grotesques et de chaos sonore, rappelant Une femme sous influence (qui lui est antérieur) de Cassavetes, Rossen devient intéressant.
Cependant, bien d’autres points ternissent le tout. Tout d’abord, ces nombreuses invraisemblances le traversant du début jusqu’à la fin lui ôtent toute crédibilité. Par ailleurs, il y a un manque de rythme notoire, de maîtrise du temps, du montage, du tri des scènes, qui nuit grandement à sa cohésion. Enfin, on sent un goût d’inachevé à la fin du film, comme si de nombreuses portes avaient été ouvertes, et qu’on avait oublié de toutes les refermer.
Bref, un sentiment mitigé.
6.5/10