Énorme déception : je m'attendais à un coup de cœur. Or, je ne suis jamais parvenu à me baigner dans ce poème d'images. Je me suis abondamment ennuyé. Comme devant le travail naïf et enthousiaste d'un enfant malhabile. J'ai beau me dire qu'à l'époque le cinéma n'a qu'une trentaine d'années, que Mario Peixoto tente d'exprimer quelque chose, qu'il expérimente un autre cinéma, peut-être de concilier sa littérature, sa poésie et le langage de l'image et du mouvement, que tout cela est louable, je n'arrive pas à accéder à sa proposition.
Je ne vois qu'un réalisateur qui s'amuse avec sa caméra sans vraiment considérer, justement, que l'image, le mouvement, le cadre sont assujettis à une grammaire qui n'a rien de littéraire et que si le fossé entre cinéma et littérature peut parfois être peu profond (certains cinéastes ont réussi cette gageure de relier ces modes d'expression), il peut également et très rapidement le creuser. Le cinéma se pense avant même de se ressentir sans doute. Ici, je n'ai jamais pu atteindre cette deuxième phase.
Les partis pris de la mise en scène de Peixoto m'ont paru tellement artificiels que je n'ai pas pu "entrer" dans son monde. Le pire est sans doute la répétition de certaines séquences. au niveau du montage, en effet, Peixoto s'essaie à la redite. Pas seulement sur un plan qu'on répète trois ou quatre fois d'affilée, comme ce zoom sur une fontaine, ou sept à huit fois ces vagues qui déferlent sur un rocher, mais également des plans qu'il remontre plusieurs minutes les avoir déjà passés. Chez les trois personnages principaux du film, c'est peut-être l'effet de lassitude que Peixoto cherche à à transcrire à l'écran. Si c'est le cas, c'est réussi. Trop. Je doute cependant sérieusement qu'il ait eu l'intention d'ennuyer son spectateur. Je le vois plutôt comme un poète essayant d'embarquer le public vers une odyssée, contemplative, mélancolique où les regrets, les désillusions, la tristesse, le désespoir sont les maîtres mots, et non pas la lassitude ou l'ennui.
Sur ce travail visuel je suis donc rétif. Largement. Mais je suis tout autant malmené par l'accompagnement musical. A part sur la toute fin où les gymnopédies de Satie me paraissent parfaitement en adéquation avec ce que l'on voit à l'écran, la musique est très souvent en complète contradiction avec les images. Parfois la musique ronfle, s'emballe, on s'attend presque à voir les indiens attaquer les cowboys, mais non, un homme regarde dans le vide, allume un cigare et marche dans la rue, s'arrête, regarde le ciel, et repart, et puis un plan sur une branche morte qui se découpe dans le ciel, une branche qu'on a déjà vue il y a trois minutes et puis toujours pas d'indiens.
Bref, ce film est sans doute un très grand film brésilien, un film expérimental (ne me parlez pas d'avant-garde, je vous en prie, je garde mon chien andalou, je vous laisse "limite"), un film-poème qui peut toucher, exprimer quelque chose que mon inculture et mon insensibilité m’empêchent d'entendre. Ce n'est pas grave. 1h55 quand même... piouuuuu.