The Pill That Changes Everything
Après le carton de The Hangover, Bradley Cooper, le nouveau beau gosse à la mode d'Hollywood s'est vu offert un rôle taillé sur mesure : celui d'un connard prétentieux qu'on se prend à adorer.
Le contexte est simple : Eddie Morra, un écrivain adulescent à l'allure d'un clodo, pour qui même s'exprimer semble difficile, et branleur devant l'éternel, se voit un jour remettre par son ex beau frère une drogue à l'apparence d'un Smarties translucide. Encore inconnue et exclusive, la dite substance permettrait de débloquer tout le potentiel de nos capacités intellectuelles. Sans trop savoir le pourquoi du comment, désespéré et à court d'idées, il ingère la petite pilule aussi appelée NZT.
Et là commence le principal propos du film : devenant une sorte de génie omniscient, tout semble réussir à cette tête de con affublée d'extensions qu'était notre écrivain raté. Mais les effets ne sont que temporaires et une fois l'effet de la drogue passé, il redevient ce bon vieux loser. Mais par la conséquence d'une scène vomissant de classicisme, il se retrouve en possession d'un stock de la taille d'un gros paquet de M&M's.
L'euphorie et le sentiment de toute puissance acquis par l'absorption de la substance est narrée ici à l'aide de calques photofiltre (les couleurs sont ternes puis éclatantes). Très tape à l'œil et vite lassant, l'effet se mélange à des pistes tout droits sorties d'une composition de Solar Fields (Mirror's Edge, Capsized) et à des tunnels photographiques du plus bel effet stylistique.
Mais l'apparition des effets secondaires se faisant sentir, le film accouche d’ellipses rappelant très fortement un certain Very Bad Trip dopé aux hormones. Noyé dans une histoire très prévisible de complot à deux balles, digne d'un téléfilm de bas étage, le film se laisse regarder et enchaîne ses scènes thrilleresques à des scènes d'action un peu plus travaillées qui aèrent un film déjà bien lourd par moment, même si certaines incohérences viennent gâcher un peu la fête.
Malheureusement le film se perd dans d’innombrables dédales, où bien souvent la sauce ne prend pas. En ayant un sujet aussi brillant, on aurait pu s'attendre très logiquement de la part du réalisateur, à une critique de notre société, où la recherche de performance et d'efficacité absolue gouverne nos vies. Rien de tout cela n'est pourtant question dans le film. Effleurant d'autres sujets comme l'addiction aux drogues ou la folie du monde de la finance, le film ne dépeint absolument rien et n'oriente en rien son oeuvre en tant que réquisitoire de ces questions, apparaissant pourtant comme évidentes dans le film.
On pourrait se dire que le réalisateur, un peu comme celui Time Out en fait, traite la partie visible de son sujet et puis c'est tout. Il ne s'encombre pas de réflexions, il se contente simplement de les faire apparaître au spectateur. Car en effet, il n'y a ni message sous-jacent, ni morale, juste une bonne idée dans un bel enrobage, avec un bon casting et une esthétique appréciable, bien qu'à la pertinence douteuse, du divertissement qui fait monter la pression pour faire "pshit..." à la fin.
Mais c'est sans compter sur ce coup de génie d'une fin bien que frustrante et assez facile, mais qui cache en fait un des plus beaux doigt d'honneur fait aux vieux de la vieille. Une jubilation sans pareille quand Bradley Cooper, le petit nouveau, le merdeux, rabat le caquet à ce cadavre de De Niro, dont l'ombre porte encore les stigmates d'une prostitution audiovisuelle sans limite. Du plus bel effet, cette scène résonne comme une sonnette d'alarme à l'ancienne génération criée par la nouvelle, il serait en effet temps de laisser sa place.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.