Lion Man
4.5
Lion Man

Film de Natuk Baytan (1975)

A cette époque où j'étais friand de nanars turcs, que j'étais plus jeune et que j'avais beaucoup plus de temps à perdre, j'avais commencé à regarder Kiliç aslan, en VO non sous-titrée. Mais alors que des films comme Olum savascisi ou En buyuk yumruk, même sans en comprendre la langue, sont de très bons divertissements grâce à la tonne d'incompétence visible à l'écran, avec Lion man je m'étais ennuyé.
Toutefois, quand j'ai vu sur Facebook que quelqu'un vendait la VHS française, j'ai sauté sur l'occasion. J'étais curieux de savoir à quoi ressemblait la VF d'un film avec Cuneyt Arkin ; et à ma connaissance, c'est le seul à être sorti en France, sous les titres de Lion man et Comme un lion, selon l’édition VHS. Cuneyt se voit renommé Steve Arkin, et tout le reste du cast a des noms américanisés. Contrairement à ce que je pensais, le réalisateur n’est pas celui de Turkish Star wars, mais c’est tout comme.
Au final, la VF n’est pas si nulle que ça, si ce n’est que l’intonation des doubleurs est un peu bizarre parfois, on dirait qu’ils hachent leurs paroles ou parlent trop vite, juste pour coller avec les mouvements des lèvres. Mais il n’y a aucune réplique culte, ni de voix particulièrement risible. Non, en fin de compte, c’est tout le reste qui fait rire.


Étonnamment, on dirait que Kiliç aslan a bénéficié d’un budget confortable, à voir tous ces chevaux, ces figurants, ces décors et costumes, … Ce qui ne veut pas dire que le réalisateur n’a pas tout foiré quand même.
Difficile de déterminer l’époque et le lieu où est censée se dérouler l’histoire, tant tout est mélangé : aux habits purement arabiques se mêlent des costumes de chevaliers, de vikings, et de romains, dans des couleurs fantaisistes, faisant passer des armures pour des vêtements de clowns. Sans compter qu’il y a régulièrement des épées en plastique ou des couronnes en papier d’alu.
Ce que j’ai compris, c’est que deux clans s’opposent dans le film ; il y a une bande de rebelles qui cherche à renverser un tyran qui martyrise son peuple. Je crois. Et le fils du roi s’avère être le frère d’un homme sauvage, Lion Man, qui rejoint le clan des gentils.
Mais je crois que la personne qui a fait le résumé de la VHS n’a pas compris le film mieux que moi, donc ça rassure.


Il faut imaginer Kiliç aslan comme une sorte de version suédée de Game of thrones. Il y a l’environnement médiéval, les complots, les retournements de situation, mais avec des combats évoquant ceux d’enfants qui jouent entre eux. Et Cuneyt, ce serait le gamin qui triche tout le temps, le genre qui refuse d’admettre qu’il est censé mourir quand il se prend 5 épées dans le bide. Comme à son habitude, l’acteur joue un surhomme, qui rejette une flopée d’ennemis d’un seul revers de la main.
Il finit tout de même par mourir, mais qu’on se rassure : le personnage a un fils, qui grandit pour finir par être son portrait craché.
Le petit Cuneyt est élevé par les lions, et grandit avec un pagne qui ressemble à un tutu.
Et une fois adulte, cet enfant sauvage devient le fameux Lion man, encore plus fort que son père. Alors là on retrouve le Cuneyt qu’on connaît : son surjeu, ses mimiques pas possibles, ses frappes avec la paume en avant et les doigts retroussés, son usage des trampolines, …
La petite nouveauté ici, c’est son rugissement, ridicule. Et pourtant, les méchants sont victimes du même phénomène que dans L’homme-puma, où l’on parlait du héros comme d’un "félin qui volait" ; ici on te sort "on aurait dit qu’il avait des griffes de lion !".
A l’inverse, le méchant de Kiliç aslan est complètement inexpressif. Il ne sait que rester impassible, ou faire un sourire bête ; dans les deux cas, c’est à éclater de rire. Le pire c’est le nom qu’on lui a donné en français : Antoine. Aussi appelé Antoine le sanguinaire.


Une fois recueilli par d’autres hommes, Lion man a une romance avec une femme avant même de savoir s’exprimer. Ce n’est qu’ensuite qu’il apprend à parler, en un temps record (enfin, il faut dire que le film est rempli d’ellipses aussi abruptes que surprenantes), et à manier une épée.
Il est fin prêt pour combattre les ennemis du peuple.
La plus belle séquence survient presque à la fin : c’est l’affrontement entre Lion man et son frère, suivi d’un combat avec les hommes du roi. Déjà on voit sur certains plans le matelas qui sert à amortir les chutes, mais ensuite, ça vire au délire complet : par une série de jump-cuts, Cuneyt se téléporte sur une tyrolienne qui se trouvait là et balance n’importe comment des épées en nombre infini qui viennent se planter dans ses ennemis, puis il se retrouve accroché à des anneaux et fait des acrobaties qui désarment les méchants, et ensuite il apparaît sur des barres accrochées au mur, faisant des tours sur lui-même.
C’est étourdissant de bêtise et à pleurer de rire, on croirait une parodie de combats qu’on aurait pu voir dans un film des ZAZ.
De plus, depuis le début du film, sur chaque combat, il y a toujours la même musique, qui évoque celle d’un cirque, et qui prend tout son sens ici.
EDIT : j'ai revu un passage du combat sur youtube, et en fait la musique est totalement différente dans la VO. Etrange.


Après un dernier combat interminable, dans la pure tradition turque, le générique apparaît, comme ça, sans épilogue, sans mot de la fin, rien. Enfin d’ailleurs, c’est déjà bien d’avoir un générique, parce que d’habitude on peut juste lire "SON" ("fin", en turc).
Ce qui est fou, c’est que ce film-ci, comme d’autres de Cuneyt Arkin, semblent faire partie du patrimoine culturel Turc ; je me suis souvenu avoir vu il y a quelques années un extrait d’un JT qui évoquait le tournage de Ghost rider 2 en Turquie… et ils avaient mis des images de Lion man, probablement tourné au même endroit ! http://www.aintitcool.com/node/48269

Fry3000
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le 8 juin 2015

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