Il me suffit parfois de repenser aux prouesses de Jackie Chan, à ses cascades de dingue dans tel ou tel film, pour que j’aie envie de m’en faire un nouveau. Il faut dire qu’il a une filmographie très fournie, mais j’ai déjà vu tous les plus réputés. Dans son top SensCritique, il n’y en avait que deux que je n’avais pas encore vus, deux récents.
J’ai opté pour Little big soldier, même si je me méfie des Jackie de ces dernières années et que je n’adhère vraiment pas à ses films d’arts martiaux se déroulant dans l’Asie féodale.
Mais c’est "Le meilleur film de Jackie Chan depuis des années", d’après la jaquette DVD… bon bah ok…
Jackie Chan a déjà joué les types ordinaires, mais dans Little big soldier je l’ai vu pour la première fois jouer carrément un lâche. Un soldat pris dans une guerre entre plusieurs états Chinois, deux siècles avant J.C., et qui ne souhaite que rentrer auprès des siens, mais les problèmes viennent le trouver. Il transporte avec lui un général ennemi, afin d’obtenir une récompense. Mais les troupes de son prisonnier sont à leur poursuite.
On a la situation classique des deux personnages associés malgré eux, mais l’humour dans ce film-ci est plutôt efficace, alors que c’est rare que ça me plaise dans des films orientaux (par exemple je suis totalement hermétique à l’humour des Police story). Il reste quelques gags assez nuls et puérils, mais il y a quand même pas mal de bonnes idées, notamment avec les divers bricolages et astuces dont se sert le héros pour échapper aux combats.
Et la légèreté côtoie sans problèmes des passages au ton plus grave, Little big soldier étant plutôt saignant pour un film de Jackie, puisqu’aussi bien les gentils que les méchants tuent pour n’importe quel prétexte.
C’est également la première fois que je vois un film de Jackie aux airs de blockbuster ; Little big soldier aurait coûté 25 millions de dollars, et on a droit à une photographie soignée, de beaux décors naturels, quelques agréables séquences en animation 3D, et des plans dignes d’une fresque épique avec une tonne de figurants.
Alors quelle énorme désillusion quand à côté de ça, j’ai vu le premier combat, qui est littéralement illisible !
Il s’agit juste de deux types épuisés qui se battent à l’épée, mais les emplacements des coupes du montage et le passage d’un angle de vue à un autre font qu’on ne comprend rien ! Et ce dès le tout premier coup : un type veut abattre un drapeau, mais quelque chose l’en empêche, et il faut attendre quelques plans pour comprendre qu’il a été interrompu par un homme sorti de nulle part, parce qu’on ne voit d’abord que le bout de son épée, vite fait.
J’avais peur, véritablement, que ça affecte aussi les combats avec Jackie. Et c’est le cas.
L’acteur/cascadeur a toujours des idées d’une ingéniosité bluffante pour utiliser les objets et décors autour de lui, mais ça n’arrive que dans deux très courts passages (le couteau dans le rondin au début, et quand le héros grimpe à un arbre vers la fin), et on ne peut même pas en profiter pleinement à cause de ce découpage qui handicape l’action au lieu de l’assister !
Ce qui est encore plus tragique, c’est la frustration qui accompagne l’impression qu’un plan tout simplement moins serré aurait aidé à la compréhension ! Mais là, des objets ou personnages rentrent ou sortent du cadre, sans laisser le temps de comprendre ce qu’on voit.
C’est un véritable gâchis.
Déjà qu’il y a peu de combats, parce que le héros préfère les fuir, et que quand il y en a, il fait preuve de peu de talent. Dans Mister Cool, Chan jouait un cuisinier qui s’avérait miraculeusement doué en combats, c’était pas cohérent mais on s’en fout tant que les cascades sont intéressantes.
Pourtant sur Little big soldier Jackie était à la fois scénariste, acteur, producteur et chorégraphe sur, et d’habitude il surveille la mise en scène et le montage de sorte qu’ils mettent bien en valeur les combats, même quand il n’est pas à la réalisation.
Je ne comprends pas ce qui s’est passé ; peut-être que c’est parce que le réalisateur a préféré filmer tout le temps avec plusieurs caméras plutôt que de faire un véritable découpage au préalable, et qu’il a fallu se débrouiller au montage.
Du moins j’imagine que c’est comme ça que ça a été tourné, vu la multitude des plans, qui s’enchaînent à toute vitesse, et tant pis pour les faux-raccords !
C’est bien souvent difficile de suivre ce qu’il se passe, en 10 secondes il y a peut-être 7 plans présentant un angle et une échelle différente, juste pour voir le héros qui conduit sa charrette…
Sans compter tous ces effets d’accélérés, de ralentis, et ces jump-cuts…
Du coup, à vouloir être trop rapide, le montage ne laisse vivre aucune séquence, les moments de calme sont montés de la même façon.
C’est aussi bien un problème de montage que d’écriture, mais les personnages ne sont pas développés non plus, et les passages qui se veulent dramatiques ne fonctionnent pas.
C’est dommage parce qu’il y a quand même des efforts pour apporter des idées intéressantes au scénario… mais la plupart des éléments qui, selon moi, auraient pu donner plus de profondeur au film, ne surviennent que dans les 20 dernières minutes.
Un gâchis, tout simplement. Little big soldier avait le potentiel d’être tellement mieux.