Pêche par un manque d’envergure dans l'écriture

Un film de gangsters sur lequel Ben Affleck a semble t'il été omnipotent. Il cumule en effet les fonctions de producteur, scénariste, réalisateur, interprète principal et possiblement d'autres qui m'auraient échappées.

Le film retrace donc l'épopée de Joe Coughlin, petit délinquant à Boston et son ascension au sein de la mafia dans les années 20-30. Pas de problèmes au niveau de la retranscription de l'époque, les décors, costumes sont de très bon niveau et on n'a aucune difficulté à se retrouver plongé dans l'ambiance.

Parlons de ce qui fâche un peu plus. La phrase d'accroche de l'affiche américaine ("Joe was once a good man - Joe était jadis un homme bien") résumé un des premiers problèmes que j'ai eus avec ce film. Le personnage de Ben Affleck n'est pas mal écrit et a des côtés intéressants, notamment une ouverture d'esprit et des valeurs morales bien en avance sur son temps. Mais, contrairement à ce qu'annonce l'accroche, Joe ne perd jamais son statut "d'homme bien" , il l'est à la base et le demeure tout au long du film. En quoi cela pose problème ? Et bien, à chacun de déterminer ce qu'il préfère voir dans le protagoniste principal d'un film de gangster qui intègre la mafia : un homme droit avec des principes dont il ne démord pas de bout en bout (ce que j'ai trouvé un peu plat et ennuyeux), ou quelqu'un qui a ses mêmes principes mais qui est en lutte constante avec eux à cause de la pression du milieu dans lequel il évolue, voire qui finit parfois par passer du côté obscur. Personnellement, je préfère la seconde catégorie, et c'est sans doute pour cela que, bien que correctement écrit, le personnage m'a globalement paru un peu trop "lisse". Le film aurait probablement gagné à élaborer davantage la psychologie de son personnage principal.

Mais qu'en est-il du reste du cast ? Et bien, Elle Fanning et sa face d'ange tirent clairement leur épingle du jeu. Après The Neon Demon de Nicolas Winding Refn, elle se retrouve de nouveau dans la peau d'une jeune fille d'abord ingénue puis beaucoup plus torturée qu'elle ne le semble en apparence, et elle fait merveille dans ce type de rôles. Pour le reste, il n'y aucun personnage qui soit suffisamment développé ou exploité pour ressortir du lot et marquer le spectateur. Et à mes yeux, c'est là le principal défaut : à cause entre autre de ce manque de développement, le film pêche au niveau de l'intensité dramatique. J'ai eu du mal a me sentir touché ou concerné par les passages qui sont censés produire cet effet. Le film est long (plus de deux heures), il aurait été souhaitable que ce temps soit mieux exploité, notamment pour creuser la psychologie des personnages et leurs relations, plutôt que de consacrer ce temps à des subplots qui ne sont pas forcément de grand intérêt (je pense notamment au personnage de Sienna Miller). Le scénario est globalement très convenu, sans réelle surprise et manque d'un peu de rebondissements.

Au niveau de l'acting pur, Ben Affleck porte bien le Fedora, pas de doute là-dessus, mais j'ai eu l'impression de voir Ben Affleck qui essaie de jouer un gangster plutôt qu'un gangster proprement dit. La différence est subtile, mais elle est importante.

En résumé, ce n'est nullement mauvais, mais il manque ce qui fait les bons, voire les grands films du genre : l'impact émotionnel.