Alors dans les grandes lignes, Looper, c'est l'histoire d'un Joseph Gordon-Levitt déguisé en Bruce Willis mais jeune (si si, il essaie même de l'imiter et galère un max pour être expressif avec ce vilain maquillage qui le défigure, comme s'il avait besoin de tout cela pour ne pas l'être...), tueur à gages passant la moitié du film dans ou autour de champs de canne à sucre, et à qui l'on livre ses victimes depuis le futur, en boucle: UPS, I did it again. Entre deux exécutions, Joe regarde son gousset, façon "quelle heure Joe ?". Bien entendu, à un moment donné, il va vouloir changer le cours de l'Histoire (enfin, c'est surtout son vieux lui, m'voyez). J'aime la SF. J'aime les films qui traitent du voyage dans le temps. Pour peu que l'artifice soit exploité intelligemment (pas forcément d'un point de vue scientifique, mais purement narratif), ça peut donner lieu à des situations franchement cools, auquel cas je ne vais pas être très regardant sur les petites incohérences ici ou là. Terminator 2 en est la preuve ultime. Looper, c'est du T2, du Retour vers le futur, du Timecop (j'ose !) et un million d'autres influences, plus ou moins bien digérées.


Mais c'est aussi et avant tout une première partie très réussie, mettant en place les enjeux, dépeignant un univers futuriste certes dépouillé, mais laissant le spectateur dans le flou avant de le guider dans la timeline, un peu comme le ferait un Andrew Niccol inspiré. Et une fois que tout est habilement présenté...et bien c'est là que ça se gâte ! Le héros se retrouve dans la cambrousse pour tout le temps restant ou presque. Sauf que n'est pas Jeff Nichols qui veut. Le film s'embourbe alors, multiplie les longueurs, tombe dans des travers jusque là évités, de la mièvrerie, de l'histoire d'amour calculée à des kilomètres, du rebondissement inutile, et surtout, pas de rythme. Nada. Un énorme ventre mou avant un sursaut salvateur de celui qui fut John McClane jadis, et enfin un dénouement assez brutalement amené (mais brutal dans le bon sens, pour le coup).


Autrement, et malgré un véritable effort d'immersion, je suis quelque peu resté sur ma faim quant à l'univers en lui-même. L'action est censée se dérouler dans le futur (même dans le présent, c'est déjà le futur, enfin, j'me comprends !) et là c'est quand même assez cheapos. Alors oui, budget faible, etc. Admettons. Mais dans le même ordre d'enveloppe, on a quand même eu du Snowpiercer ou encore du District 9 ces dernières années, et le fossé en matière d'audace visuelle entre les films de Bong Joon-Ho/Neil Blomkamp et celui de Rian Johnson, est tout bonnement sidérant. Côté acteurs, si Willis garde le cap de tout son charisme, sans pour autant surprendre, j'ai trouvé Gordon un peu light (c'est peut-être grâce à ça qu'il Levitt...). Je veux bien qu'il soit plus jeune, moins expérimenté, mais à un moment donné se pose la question de la crédibilité dans un rôle. A part ça, le gosse que l'on subit quand même pas mal en deuxième partie s'avère moins pénible que prévu. Blunt fait le job sans éclats mais avec copeaux. Et puis désolé mais Jeff Daniels en méchant, moi il me fait autant marrer que dans Dumb & Dumber, et ça, je suis pas certain que ce soit bon signe !


Quand un Harmony te présente le réalisateur en évoquant deux de mes épisodes préférés de l'excellente série Breaking Bad (The Fly et Ozymandyas, pour ne pas les nommer), les attentes ne peuvent que s'élever, tout en demeurant modérées dans la mesure où nous avons affaire à l'un des tous premiers longs de celui qui réalise le prochain Star Wars (paye ta promotion !). De bonnes idées pas toujours finement exploitées (les TK, base posée et non développée, parmi tant d'autres choses), il en découle une belle déception (Ho ho ho, joli loupé !). Un beau gâchis, de quoi en perdre l'appétit, à l'image de ce face à face au diner, qui dure des plombes tandis que ni Willis ni Levitt ne toucheront à leur assiette...

Gothic
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le 17 avr. 2016

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