Kind, Sie riechen Tod

Que dire,
Sans vouloir être l'antithèse d'une autre critique,
Ce film est d'une maîtrise incroyable, on m'avait
prévenu d'une éventuelle branlette cinéma,
j'ai été caressé par des mains expertes.

Le début est laborieux, la mère et le père ne sont pas très
efficaces, les personnages et les acteurs ne sont pas au point... En fait, le silence sourd et le poids lourd des esprits abasourdis ne sont pas crédibles simplement parce qu'il était trop difficile de l'exprimer
par la suggestion après 1 minute de film, mais les premières scènes
auront quand même l'importance de planter le décor,
Le film va prendre son temps, poser les images, les mots seront souvent inutiles...

Dès lors, on obtient un contraste tout le long du film,
l'Histoire nous impose sa poésie et son horreur à travers des images d'une beauté aigre-douce inouïe, tandis que les dialogues renforcent l'ici et le maintenant, un voyage entre deux mondes et la magie opère, une harmonie de la condition humaine très réelle...

Les scènes se succèdent, et la débrouille chaotique de gosses
essayant simplement de mettre la main sur quelque chose de comestible nous imprègne bien de la misère et la confusion qui régnait
en Allemagne après-guerre, c'est très efficace, on sent une certaine
mécanique démonstrative de la réalisatrice, tout en ponctuant par des pauses très organiques, un autre voyage entre 2 mondes,
le décor hostile d'une forêt immaculée ou encore d'un lavoir impersonnel, et les touchers et la découverte des corps par l'adolescente

J'ai aimé les dialogues pour ce qu'ils apportaient de futilité et de réalisme, on essaie tous toujours de dire des choses intelligentes,
et au final, à trop vouloir bien faire on finit par faire de nous des imbéciles, (par exemple le pseudo-esprit critique des gens dans le train, "Mais en fait, ce n'est qu'une seule photo prise sous plein d'angles différents, d'ailleurs, on voit jamais une photo d'un type en train de les tuer") : j'étais sidéré, de nos jours, il est rare d'entendre quelque chose sonner aussi juste : bravo.

Puis, sans dévoiler l'histoire, on voyage vraiment avec cette troupe
de désespérés, de bout en bout du voyage, la réalisatrice sème ci et là des sujets qu'elle affectionne par le biais d'une photo, de la fraîcheur d'un placard, d'un bras tendu, de petits rien suggérés, et
c'est ce que j'aime le plus dans le cinéma,

donc, je vous conseille ce film, grandiose, horrible, triste, implacable.

Lorsqu'on arrive à destination, parfois, rien a changé, mais tout est à refaire, parce qu'on a changé, et la route est longue.