Quatre années après avoir découvert cette œuvre, je sens encore la paume de ce film toucher violement ma joue. Cette claque, ce soubresaut de libertarisme. Ce film transpire la liberté à chaque images. Il faut que j'en parle. Absolument. Alors on est partit.


Los Angeles 2013 sort en 1996 et fait suite au film New York 1997. D'ailleurs, dans la trame, on est quasiment sur le même film. Cette fois, l'intrigue se déroule à Los Angeles. Mais Los Angeles ressemble beaucoup au New York du film précédent. On y envoie les bandits et autres gus qui ne sont pas compatibles avec le puritanisme du continent américain. Oui. Los Angeles est désormais une île. C'est à cause d'un foutu tremblement de terre. Mais ça leur va pas si mal aux types qui gouvernent les Etats Unis. On fait de Los Angeles un lieu de non droit, les petits cons s'amusent à faire ce qu'ils veulent dans cette ville tant qu'ils nous emmerdent pas chez nous. Sauf qu'à LA, un type a pour projet de faire s'éteindre la planète. Plus de réseau électrique. Plus d'internet, plus de porno, plus d'amazone. Nous retrouvons Snake Plissken, interprété par Kurt Russell. Snake est un ancien soldat, plutôt badass, repris de justice, qu'on charge d'aller stopper ce type en un temps donné, sinon il meurt d'un poison qu'on lui a injecté au préalable.


A peu de choses près, on est sur du remake New York 1997. On pourrait donc se demander si ce que ce film est si pertinent.


Pour ma part, il l'est beaucoup plus que New York 1997.


On entend souvent parler de la période anarchiste du cinéma de Carpenter. Une forme de cinéma libéré de toute "prétention". De Jack Burton à Los Angeles, on sent chez ce réalisateur une facilité à la décomplexion. On s'en fout, on fonce et on verra ce qu'il adviendra. Les dernières minutes de Dark Star sont une entrevue de ce cinéma là. On s'en fout, on fonce. Et à cet instant précis, on est dans du pur cinéma. On est dans ces mises en scènes que l'on ne pourrait jamais reproduire dans d'autres disciplines artistiques. Il en est de même dans son cinéma d'horreur, ou le mal n'a pas de forme, il est donc partout, nul part. Seul le cinéma, par ses montages et ses mouvements de caméra, peut retranscrire cette idée. Bref, Carpenter est un maître incontesté, un grand cinéaste. Revenons à notre film.


Los Angeles peut paraître très hostile. C'est parce qu'elle est filmée comme une ruche, une antre de vie ou se meuvent des corps inquiétants qui créent sans jamais s'arrêter. ça grouille, c'est dangereux mais ça foisonne. L'âme de Carpenter se répand sur l'ile de Los Angeles à travers la mise en scène et la musique.


Et cette île devient une aire de jeu. Un bac à sable. Un bac à sable pour Snake : On fait du basket, on joue à faire pan pan avec des méchants, on fait du surf ! ... On s'autorise une petit voyage en deltaplane. Un bac à sable pour Carpenter également : il pastiche le western, il crée une icône visuelle de la masculinité avec Brio sans pour autant tomber dans une idolation sans réserve. Il met la voix d'un homme dans le corps d'une femme. Il s'amuse avec la 3D qui a très mal vieilli. Il fait du cinéma. Pur.


La fin est la plus anarchiste. On sent ici l'engagement de Carpenter, la défiance qu'il a toujours eu envers les Etats Unis, le recul et la radicalité de son propos. Snake se fait trouer de balles, mais il est toujours debout. Parce que le Snake qu'on voit n'est que l'hologramme du Snake qui est caché, plus loin. Ce Snake qui a réussi la mission ne donne pas la télécommande qui éteindrait le monde au président des Etats Unis d'amériques. Il éteint lui même le monde. Il donne raison à ce Los Angeles en pleine anomie. Il fait du monde, un gigantesque Los Angeles. On imagine que tout va s'effondrer, à commencer par l'image de Snake qui disparaît. Snake n'est qu'un film. Enfin pas tout à fait. Il trouve des clopes, des American Spirit. Il en fume une, nous regarde et nous murmure :" welcome to the human race"...
Quelle puissance. Après avoir éteint la civilisation, on repart sur de nouvelles bases. Le puritanisme des Etats Unis n'a rien de plus classe que le dépotoir Los Angeles. Quand Démolition Man dit qu'il faut que ces deux mondes se rencontrent pour créer une civilisation équilibrée, Los Angeles 2013 semble dire : ces deux mondes sont le fruit de la civilisation. Maintenant que tout est éteint, on redevient humain. On se redécouvre dans l'obscurité du monde. C'est fort, c'est anarchiste anti-civilisationnel, c'est radical, on s'y attendait pas dans un film comme celui-ci et on aime.


En soit, Los Angeles est plus pertinent que New York dans le sens ou il avance toujours un cran plus haut. à la manière des Evil Dead 1 puis 2. On va plus loin et on voit ce que ça donne. En l’occurrence, ça donne un chef d’œuvre selon moi, un nanard, selon certains.
Los Angeles 2013 est un film qui fait date dans mon rapport au cinéma. Avec ce film j'ai appris que peu importe ce qu'on te raconte, faut qu'elle soit racontée à 200%. On s'en fout, on fonce et on verra ce qu'il adviendra. Souvent il n'en advient que du bon. A la manière de la fin de Dark Star, Los Angeles grouille de pépites hors de la réalité qui nous emmènent bien plus loin qu'on aurait pu l'imaginer. Si vous acceptez de prendre la déferlante avec lui, vous allez découvrir une pépite.

SnakePli
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le 15 sept. 2020

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