Pour offrir une vie meilleure à Max et Léo, Lucia, mère de famille mexicaine, arrive à Albuquerque où elle compte s’installer avec ses fils. Dans un appartement délabré, choisi par défaut au gré des offres indécentes et des logements rebutants qu’ils ont visités à leur arrivée, les frères scrutent, comme dans un mirador, les activités d’un quartier transfrontalier où diasporas chinoises, mexicaines et américaines inventent des nouvelles manières de vivre. Pendant que la mère se tue à la tâche, accumulant différents emplois, dans une « fabricas » au début de la journée avant d’enchaîner dans une autre usine où elle réalise des tâches ménagères, Max et Léo (qui sont réellement frères) s’échinent à tuer le temps dans cet appartement.
Grâce à un magnétophone, Lucia tente de donner de la voix, des consignes et des règles à respecter pendant son absence. Las, les enfants trépignent. Leur créativité s’accroît. D’un rien naît des matchs de football, des personnages fictifs dessinés sur les murs, des astuces mentales pour déjouer le lent écoulement du temps. Jusqu’à ce que la voix des autres jeunes de la résidence ne fasse écho contre les quatre murs de leur appartement trop maigre. À mesure des échanges, parfois violents, naîtra l’altérité. Cet autre qui mélange l’anglais et l’espagnol. Cet autre qui n’est pas toujours bienveillant. Au-delà des voisins, le film interroge aussi cet autre situé à proximité de nous, ce frère, cette mère, leurs actions mais également, en reflet des leurs, les nôtres. De cette fratrie touchante, bagarreuse, chamailleuse et tendre éclot également une complicité foisonnante. Sans misérabilisme ni excès d’héroïsme, le réalisateur traite Lucia et ses enfants simplement, elle tantôt fatiguée, tantôt forte et eux, souvent affamés de monde et de rencontres. Malgré cet environnement subit comme les longs trajets en transports en communs qui la font transiter entre ces emplois et son domicile, et celui du confinement obligé pour les enfants, la porte sur le monde n’est jamais totalement fermée à clé.
Dans son essai A Room of One’s Own Virginia Woolf défendait l’idée qu’une femme souhaitant produire une œuvre romanesque avait au minimum besoin « de quelque argent et d’une chambre à soi ». Pour s’épanouir, Lucia tente également de gagner quelque argent et de leur offrir, à eux, à ces Lobos, à ces Wolves, une chambre à eux.
https://lestylodetoto.wordpress.com/2021/03/26/los-lobos-une-chambre-a-soi-wolf/