Terre promise
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La vie n'est pas tendre dans beaucoup de coins du monde pour les petits, les faibles et les doux. On le sait bien, c'est une idée abstraite déjà assez pénible comme ça. Quel besoin de tourner le couteau dans une plaie déjà béante ? Il y a indéniablement un certain masochisme à s'infliger systématiquement des films sur la misère ambiante mais, parfois, ce sont des claques bienvenues. Ou tout du moins nécessaires. Pour ne pas oublier qu'en Colombie, par exemple, être un enfant est parfois un véritable calvaire, quand on n'a pas une famille protectrice derrière soi pour éloigner la cruauté. Au départ, la petite bande qu'on suit dans les rues de Medellín est un peu exaspérante. Elle traîne, ne dit jamais rien de bien construit, pique des trucs, sniffe le reste, et semble cultiver une certaine violence plus par goût que par nécessité. C'est toute l'astuce de ce scénario lent et retors. Parce qu'une fois qu'on connaît ces garçons horripilants, on découvre leurs aspirations enfantines et, forcément, on s'émeut de leur naïveté. J'allais dire de leur pureté. La pureté des criminels, curieusement, celle qui ancre dans les têtes en friche des rêves inaccessibles. Ici, il s'agit de l'héritage lointain d'une grand-mère presque oubliée. L'aîné de la petite famille improvisée reçoit du gouvernement une enveloppe pleine de documents qu'il faut qu'on lui lise : la maison de sa grand-mère est désormais à lui. L'enfant des rues, aîné d'une fratrie dépareillée, espère subitement avoir un véritable refuge, inaliénable, et cesser d'être chahuté d'une rue insalubre à l'autre. Et ce rêve incandescent, vite partagé par ses amis, va le consumer et le détruire, mais à petit feu, un faux espoir après l'autre. C'est d'une cruauté rare, d'un sadisme calculé, dilué dans les errances apparemment sans grande cohérence de 4 adolescents, presque des enfants, dans un pays encore sauvage dès qu'on quitte la ville, elle aussi sauvage, mais d'une autre façon. Honnêtement, j'ai souvent trouvé le temps long et j'aurais bien passé quelques séquences en accéléré, mais quelque chose m'a retenue et je suis allée au bout de cette descente aux enfers en forme d'échappée belle. Une souricière qui emprunte à Los silencios autant qu'à Capharnaüm, deux références loin d'être infamantes. Au bout du compte, une expérience qui oscille entre pénible et salutaire. A vous de voir, donc.
Créée
le 10 mars 2024
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