La nuit, je mens.
For relaxing times, make it Suntory time. Ville à la fois moderne et historique, lieu d’un pèlerinage sentimental impromptu. Lui essaye de s'éloigner d'un couple en perdition et, elle, suit son...
Par
le 16 févr. 2014
163 j'aime
11
Quel plaisir de donner son avis sur un film si particulier qui a touché des millions de personnes de millions de façons différentes selon les degrés de sensibilité de chacun.
Je tiens à prévenir le lecteur que les spoilers seront légion dans cette critique du deuxième long métrage de Sofia Coppola, oscar du meilleur scénario original et césar du meilleur film étranger.
Ce qui m'a personnellement frappé dans ce film est dans un premier temps cette manière de rentrer dans l'intimité des protagonistes sans que la caméra n'en devienne intrusive, invasive. On resté à la juste distance mais aussi à la juste proximité des deux comparses dont on parle ici : Scarlett Johansson et Bill Murray.
Le décor peut aussi être considéré comme un personnage à part entière tellement l'immense ville de Tokyo pèse sur Charlotte et Bob et les conditionnera dans leur solitude et ce sentiment d'être perdus.
L'insomnie tiendra d'ailleurs aussi un rôle très important, comme si elle participait à ratatiner l'ego des deux "amoureux". Paradoxalement cette difficulté à s'endormir les unira (cf.le petit mot de Bob à destination de Charlotte glissé sous la porte de sa chambre "Are you sleeping?").
Comment ne pas glisser un mot sur la bande originale, sublime, vaporeuse, allant d'Agnes Obel à Patti Smith en passant par le magique "Alone in Kyoto" de Air. Des morceaux planants entrecoupés d'autres qui viendront rythmer les différentes soirées tokyoistes auxquelles on a envie de participer.
"Brass in Pocket" des Pretenders ainsi que "More Than This" de Roxy Music pour un inoubliable Karaoké et le prémonitoire "Too Young" des Phœnix (Sofia Coppola épousera le chanteur du groupe quelques années plus tard.
Scarlett Johansson
La réalisatrice a utilisé l'actrice de manière très picturale (cf. La culotte et la perruque roses, cette proximité à filmer son corps ou ses jambes nues).
La petite américaine illumine littéralement le film par une certaine naïveté solaire entre autre die à son jeune âge (elle ne sait pas encore quel chemin prendre ni quel sens à donner à sa vie).
On en vient à se demander comment son mari John (référence quasi explicite à Spike Jonze, ex mari de la fille de Francis Ford Coppola, elle même représentée par Charlotte, née à New York et contrainte à déménager à Los Angeles tout comme la jeune réalisatrice) peut rester de marbre en voyant Charlotte déambuler devant lui tres légèrement vêtue. Autant vous dire que j'aurais annulé de suite tous mes rendez vous professionnels de la journée! Peut être un petit reproche plein de bienveillance de la réalisatrice a son ex mari...
Bill Murray
Lui, incarne à la perfection cette "ancienne" gloire du cinéma américain, ce vieil homme seul (malgré sa femme et ses enfants), blasé, désabusé voir cynique mais dans le même temps terriblement drôle et attachant (une espèce de clown triste à la retraite qui s'approchera pas mal du rôle qu'il tiendra deux ans plus tard dans le sympathique "Broken Flowers" à croire qu'on est pas loin d'un rôle de composition).
Sofia Coppola avouera après coup qu'elle n'aurait jamais tourné ce film sans Bill Murray, elle l'a même traqué pendant 5 mois afin que celui ci accepte le rôle.
La rencontre
La confrontation de ces deux solitudes, de ces deux etres endormis et d'un catalyseur (Tokyo ici) va faire des étincelles tels deux atomes inoffensifs qui, lorsqu'ils s'entrechoqueraient produieraient une réaction en chaîne explosive).
La résultante ne pourra que nous enchanter : on a l'impression que Bob a attendu ce retour en enfance toute sa vie.
On frôle alors les codes de la comédie romantique sans jamais y entrer de plein pied, sans jamais tomber dans la facilité ou la lourdeur qui caractérisent beaucoup de celles ci.
On a devant nous deux magnifiques inadaptés (Bob n'est clairement pas à sa place comme le montrent certains plans. Un dans l'ascenseur où il fait une tete déplus que tout les Japonais ou dans une douche beaucoup trop petite. Et Charlotte qui a lair de voguer a des années-lumière du mode de vie, de la manière de voir le monde ou des fréquentations de son mari John)
The End
L'importante différence d'âge entre la jeune Charlotte, fraîchement mariée et Bob, vétéran dans ce domaine, rendra la relation platonique même si l'envie d'aller plus loin est palpable (les yeux de Bob parlent d'eux même et la jalousie de Charlotte quand son aîné couchera avec une autre aussi)
On constate que cette différence, au delà d'être un obstacle instaure un immense respect entre nos deux héros.
Le baiser final ne sera d'ailleurs précédé que de quelques bises gênées dans un ascenseur et une main tres furtivement et joliment posée sur un pied.
Toute la magie du film réside, pour moi, ici. Dans cette retenue, ce temps suspendu, cette légèreté mesurée, ces décors habilement filmés (cf les jeux de couleur et de reflets ) et de cette sublime photographie.
Pour terminer magnifiquement on est témoins d'un mystérieux chuchotement qui a déchaîné les passions.
La réalisatrice a décidé de laisser la liberté à Bill Murray de dire ce qu'il voulait dans le creux de l'oreille de Scarlett Johansson. Depuis, des petits malins ont traficoté la bande son pour révéler la fameuse phrase finale. Mais je préfère vous laisser dans l'incertitude.
"L'expérience la plus belle et la plus profonde que puisse faire l'homme est celle du mystère" Albert Einstein.
J'aime à croire qu'il existe autant de versions de ce film que de personnes l'ayant vu.
@voir absolument avant de mourir.......
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top 10 Films, Les films vus le plus de fois, Les meilleurs films avec Scarlett Johansson, Les meilleurs films sur la vie de couple et Les plus belles histoires d'amour au cinéma
Créée
le 10 avr. 2020
Critique lue 427 fois
7 j'aime
D'autres avis sur Lost in Translation
For relaxing times, make it Suntory time. Ville à la fois moderne et historique, lieu d’un pèlerinage sentimental impromptu. Lui essaye de s'éloigner d'un couple en perdition et, elle, suit son...
Par
le 16 févr. 2014
163 j'aime
11
La ville. Ce sont ces façades lumineuses qui préfigurent Blade Runner, vitres à perte de vue derrière lesquelles se trouvent encore des êtres humains, contemplateurs d’une étendue verticale qui...
le 6 sept. 2015
159 j'aime
31
Sur une trame somme toute très simpliste, l'errance de deux personnages dans un Japon culturellement opaque, Sofia Coppola construit une relation émouvante, ouverte et tactile, éffleurements discrets...
Par
le 21 déc. 2010
133 j'aime
6
Du même critique
Il me semblait avoir déjà vu ce film étant très jeune avec le souvenir d'un émerveillement constant. Il me fallait donc un deuxième avis, un avis d'adulte mais c'était peine perdue tant Spielberg a...
Par
le 27 nov. 2015
6 j'aime
Spike Jonze a débuté sa carrière comme photographe et cela transpire de chaque plan de "Her"; le travail sur les couleurs (champ chromatique allant du jaune au rouge en passant par le rose,...
Par
le 5 sept. 2016
4 j'aime
Le film de Torino Valerii, sorti en 1973, est pour moi un chef d'œuvre du genre, idéal pour initier les plus jeunes au western spaghetti (les enfants raffolant de ces pâtes longilignes). Les thèmes...
Par
le 23 août 2016
4 j'aime
1