Résumé
Le film commence en Virginie, en juin 1958. Mildred Jeter (Ruth Negga), une jeune femme noire annonce à Richard Perry Loving (Joel Edgerton), son compagnon blanc, qu’elle est enceinte. Comme les mariages mixtes sont interdits dans leur Etat, ils se rendent à Washington D.C. pour y officialiser leur mariage. A leur retour, Richard affiche fièrement dans leur maison leur certificat de mariage et fait des plans pour construire leur maison. Mais, en pleine nuit, le shérif du lieu vient les arrêter et les conduire en prison, bien qu'ils soient légalement mariés et sans tenir compte que Mildred est enceinte. Jugés coupables, ils ont le choix entre une année de prison ou le bannissement de l'État pour 25 ans. Ils décident de partir à Washington D.C. où une amie de Mildred les héberge. Mais c’est un trop grand sacrifice pour Mildred qui veut aller accoucher dans sa famille. Ils sont à nouveau arrêtés et traduits devant le même juge. Ils ne doivent leur liberté qu’à l’intervention de leur avocat blanc qui, devant le juge, prend la responsabilité de leur retour. Plusieurs années plus tard, Mildred et Richard sont parents de trois enfants. On est en 1963, année de la grande marche pour les droits civiques sur Washington, au cours de laquelle Martin Luther King prononcera son fameux discours « I have a dream ». Mildred n’en pouvant plus de vivre loin des siens et de la campagne décide d'écrire à Robert Kennedy - alors procureur général des États-Unis - pour lui demander d’intervenir dans leur situation, arguant de leur amour et de leur honnêteté. Ils sont alors contactés par Bernard S. Cohen, avocat auprès de l’ACLU (American Civil Liberty Union) qui voit dans leur situation un cas d’école pour porter l’affaire devant la Cour suprême des Etats-Unis. Avec l’aide du constitutionnaliste Phil Hirschkop, et l’appui de la presse (en particulier Life magazine dont le reportage du photographe Grey Villet bouleversera l’opinion), la plus haute juridiction américaine promulguera le 12 juin 1967 le célèbre arrêt « Loving versus Virginia » rendant inconstitutionnelle « toute loi qui apporterait des restrictions au droit au mariage en se fondant sur l’origine ethnique des époux. » En 1967, de telles lois existaient encore dans 16 Etats américains.
Mon opinion sur ce film
Le titre du film prête à confusion. "Loving" ne signifie pas, comme on pourrait le penser, « aimant », bien qu’il traite d’un amour profond et sincère entre les personnages, mais du nom de famille des protagonistes, qui qualifia l’un des plus célèbres arrêts de la Cour suprême des Etats Unis, donnant raison à Mme et M. Loving contre la cour fédérale de Virginie, l’arrêt « Loving versus Virginia ». Cet arrêt, rendu le 12 juin 1967 à l'unanimité des neuf juges, déclara anticonstitutionnelle toute loi apportant des restrictions au droit au mariage en se fondant sur la couleur de peau des époux. Le film est inspiré du documentaire « The Loving story » de Nancy Buirski (2011).
Jeff Nichols a notamment réalisé Take shelter et Mud, sur les rives du Mississippi deux films qui se passent dans l’Amérique profonde. Loving a été présenté en sélection officielle au Festival de Cannes 2016. C’est un film âpre, qui parle de gens simples, qui s’aiment sincèrement et ne demandent rien à personne ; ils deviennent malgré eux les porte-étendards d’un combat pour faire évoluer la société américaine. La réalisation est d’une sobriété qui confine au documentaire et rend compte d’une injustice sans pathos ni effets spectaculaires.
Pour Jean-Baptiste Morain des Inrockuptibles, « Jeff Nichols filme Richard et Mildred, mais aussi tous les autres personnages avec un respect infini. Ce qui est beau aussi, dans Loving, c'est que Nichols se place toujours à la hauteur de ses personnages. »
Pour Cécile Mury de Télérama, « moins spectaculaire, moins ouvertement singulier que le reste de son œuvre, Loving déjoue pourtant tous les pièges, avec un infinie délicatesse. Jeff Nichols – qui, comme à son habitude, signe aussi le scénario du film – investit le genre biographique comme il s'était par exemple déjà emparé de la science-fiction dans le récent Midnight Special : en y instillant son drôle de souffle poétique. [...] Si Loving apparaît, malgré tout, comme le film de Nichols le plus classique à ce jour, c'est peut-être une question de respect. De sensibilité. [...] Ni militants, ni porte-drapeaux, les Loving sont à l'image du film : discrets, et profondément humains ».