Manifestement engagé le cinéma de Med Hondo trouve dans Lumière Noire un véritable jalon du polar made in France. En plaçant sur la sellette les systèmes corrompus de la police, de la justice et du journalisme le cinéaste délivre un thriller à l'identité fortement prononcée, à la technique impeccable mêlée de plans-séquence discrets mais virtuoses et de mouvements de caméra toujours au service des sujets filmés.
Lumière Noire prend comme point de départ une bavure policière présentée d'emblée comme une reconstitution criminelle au coeur de laquelle les victimes se trouvent directement condamnées par la DGSI, institution n'hésitant pas à utiliser le terrorisme comme un instrument d'intimidation notoire. Susceptible de couvrir leurs diverses opérations effectuées en sous-main ladite psychose - régulièrement évoquée au cours du métrage - n'est jamais clairement explicitée par Med Hondo, le réalisateur parvenant à démontrer les manipulations médiatiques avec une implacable subtilité.
Petit pantin laborieusement transbahuté d'un lieu à l'autre, d'un bouge coloré à un hôtel enfermant des sans-papiers éconduits, de la France au Mali l'antihéros Yves Guyot incarné par le génial Patrick Poivey mène l'enquête de cet imbroglio judiciaire en mettant pertinemment en évidence le pessimisme tranquille mais certain du cinéaste. Les dialogues, très écrits, sont en tous points magnifiques, de la même façon que la mise en scène équitable de Med Hondo : donnant autant d'importance cinématographique au rôle principal qu'au moindre figurant la réalisation de Lumière Noire est un sommet d'architecture et d'agencement !
A noter la présence au générique de quelques-uns des plus grands doubleurs français de l'époque, notamment l'imposant Jacques Frantz dans le rôle de l'agent de la DGSI ou encore le trop confidentiel Gérard Hernandez dans celui du réceptionniste soudoyé. Un film politique énorme témoignant encore une fois de la perte récente d'un immense réalisateur. Impressionnant.