Quelle violence
Ce film donne un aperçu des conséquences de la colonisation belge au Congo. La scène d'ouverture annonce la couleur. Les quelques scènes de violences explicites sont puissantes notamment quand on...
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le 2 juil. 2020
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J'étais curieux de voir ce film à sa sortie, mais je n'avais pas eu l'occasion de le faire. La lecture de "Congo : une histoire", de Van Reybrouck, m'a donné envie de réparer cette lacune. Le film s'ouvre sur deux mercenaires belges découpant et enterrant dans la brousse le corps de Lumumba, fraîchement exécuté. Flashback. 1959, Lumumba vend des bières, se bat à la tête du MNC contre le régionalisme de Kasavubu et Tshombe. Emprisonné, il est libéré pour participer à la table ronde de Bruxelles, qui fixe l'indépendance au 30 juin 60, alors que le Congo n'a aucun cadre indigène : les Belges n'ont jamais associé leurs colonisés à l'exploitation du pays. L'indépendance, qui arrive en seulement quelques mois, trouve un pays qui sombre peu à peu dans le chaos. Les étapes sont bien reprises :
les émeutes militaires, le renvoi du général Janssens, la panique des Belges, l'intervention belge au Katanga, les pressions de l'ONU, la C.I.A. qui séduit Mobutu, la destitution surprise de Lumumba par Kasavubu, la résidence surveillée, l'évasion rocambolesque sous la pluie, la capture et l'exécution, ainsi que l'élévation cynique de Lumumba au rang de martyr de l'indépendance par l'homme qui a pressé sa chute, Mobutu
Le film est fidèle, avec de belles images évocatrices, tant du cadre de vie étriqué du Congo belge que de la splendeur des paysages congolais. Il verse tout de même dans certains partis pris dramatisés : je ne crois pas que Lumumba ait dû faire face à des soldats interrompant un conseil des ministres (à vérifier), ou que sa fille soit morte pile au moment où il a été destitué. Il y a de chouettes aperçus de la colonisation belge, notamment ces certificats d'"évolués", que l'on donnait aux Congolais dont des inspecteurs vérifiaient qu'ils vivaient à l'occidentale. Cela dit, le film manque un peu de pédagogie, et il vaut mieux connaître déjà le déroulement des faits pour bien suivre ce qui se passe. Un exemple : lors de l'arrestation au Katanga, on voit un soldat enfoncer du papier dans la bouche de Lumumba, mais rien ne permet de comprendre qu'il s'agit de son fameux discours lors de l'indépendance. La mise en scène est visuelle et énergique, quoique très classique, voire un peu lourde sur les scènes de torture sadique, qu'elles viennent de sales flics belges ou de Katangais. Le film fait plutôt dans l'hagiographie : on n'explique pas que si Lumumba était en prison, c'était pour des malversations mineures. Il capture cependant l'ambivalence de ce personnage, bourreau de travail mais que rien ne préparait à devenir premier ministre. On voit les aspérités du personnage, son côté cassant qui remplace peu à peu l'ouverture d'esprit humaniste du début, voire ses accès de paranoïa, même si le film n'appuie pas trop là-dessus. La relation avec Mobutu est bien rendue, et prend quasiment une ampleur shakespearienne, sans forcer. Mais le personnage de Lumumba aurait gagné à s'effacer davantage devant le destin du pays, le Congo, cette terre maudite par sa richesse minière. En tout cas les performances d'acteur sont parfaites, rien à redire, Eriq Ebouaney en tête, sa diction, sa raideur qui collent parfaitement. C'est un film fidèle, beau, assez exhaustif, qui manque un peu de pédagogie et aurait gagné à ne pas se centrer que sur son principal protagoniste.
Créée
le 29 mars 2015
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