Luna incarne fort bien cette ivresse du groupe qui se définit par l’exclusion d’un tiers que l’on marginalise sans cesse. Le regard porté par la réalisatrice est celui d’une sociologue mais sa démarche, elle, demeure esthétique : la théorie s’évapore au soleil, par la rencontre et l’attirance de deux corps dans un décor estival où mûrissent les melons. Aussi la topographie du long métrage articule-t-il les lieux de nuit – quai, zone industrielle – qui sont des lieux de violence et de soumission, aux espaces diurnes, lumineux, « au grand air » comme le dit si bien l’adolescente soucieuse de trouver un emploi qui la tienne écartée des bureaux.
Deux excellents acteurs, Laëtitia Clément et Rod Paradot, portent cette romance douloureuse au sein de laquelle le traumatisme mute en parcours de vengeance puis de pardon, schéma suivant lequel le bourreau doit s’humilier afin de restituer à la victime dignité et virilité. La peur de Luna doublée de son attachement sincère à Alex contribuent également à recharger une masculinité par ailleurs éprouvée fort justement par l’écriture qui se plaît à défaire les stéréotypes : musicien, altruiste, doux, Alex se situe à l’exact opposé de Ruben, bad boy par excellence avec gonflette, crâne rasé sur les côtés et bébé pitbull.
Une belle démolition de standards, pour une œuvre ouverte sur un avenir plein de promesses et de perspectives.