Le premier polar à l'italienne ?

L'histoire est a priori classique : dans l'Italie de 1966, celle de l'ascension puis de la dérive d'un braqueur de bijouterie, Lutring, bien aidé par sa bonne tête de fils de bonne famille. Si le film est centré sur ce personnage, ses excès et sa dérive, les seconds rôles sont presque plus importants. Celui de sa compagne, Yvonne, jouée par une extraordinaire Lisa Gastoni, est en réalité au centre de l'intrigue. Par amour, elle essaye de le dissuader de voler, puis essaye de le sauver malgré lui, malgré le fait qu'il la batte. Elle essaiera tout pour l'assister, même les voies les plus surprenantes. Autre second rôle, celui de l'inspecteur Moroni, interprété par Gian-Maria Volonte'. Cet acteur génial donne une dimension inédite à un rôle a priori secondaire et ingrat. Moroni veut-il vraiment arrêter Lutring ? Pas vraiment, de manière étonnante il le laissera plusieurs fois s'enfuir. Moroni semble hésiter, avoir des sentiments pour Yvonne... On ne sait jamais où le situer, c'est une sorte de flic contemplatif et désabusé, un personnage assez unique dans le genre poliziottesco.

Lutring va errer à Milan puis en France à Paris et Nice de braquage en braquage, devenant un ennemi public alors qu'il est beaucoup plus amateur que d'autres bandes.

Ce film haletant du milieu des années 60 anticipe la décennie suivante, et le genre poliziottesco qui donnera plusieurs dizaines de grands films. Il en crée déjà certains archétypes : de la violence, un combat entre flics et voyous, des poursuites en voiture, et souvent des femmes victimes de la brutalité des hommes. Le tableau est déjà bien triste, celui d'une société consumériste et gratuitement violente. Il s'aggravera dans les 70's.

Un grand film du genre très recommandable, même si son message peut donner le cafard.