Vous croyiez franchement que ce cher James Wan n’avait plus le temps d’enchaîner ? Lui, qui doit mettre sur pieds un Aquaman 2 qui tarde à sortir à cause de la débandade actuelle du DCEU ? Lui, qui continue de chapeauter la saga Conjuring avec les futurs La Nonne 2 et Conjuring 4 ? Qu’à cela ne tienne, le mois de décembre 2022 nous prouvait que le bonhomme en avait encore sous le capot, pour satisfaire ses fans. Et pour cela, il s’est à nouveau associé au producteur Jason Blum (qui lui avait permis de monter la franchise Insidious) pour nous laisser aux pied du sapin un cadeau de fin d’année. Plus précisément une toute nouvelle poupée tueuse, venue marcher sur les plates-bandes du célèbre Chucky qui, il faut bien le dire, a tout intérêt à se méfier de la concurrence ! Bien qu’il y ait encore du chemin pour l’égaler.
Car crevons l’abcès d’entrée de jeu : comme nous pouvions nous y attendre, M3GAN n’est clairement pas l’exemple-type du divertissement original. Avec sa mise en scène impersonnelle, ses jump scares aux rabais, son ambiance à peine effleurée et sa violence édulcorée, il se présente à nous comme un titre horrifique bon marché. Celui qui se montre tel un produit interchangeable assurant le strict minimum pour amuser un assez large public, et ce sans jamais briller comme il le faudrait. D’autant plus que le film ose repomper sans vergogne la thématique de la poupée tueuse, maintes et maintes fois vue. Allant jusqu’à n’être qu’un plagiat du remake de Child’s Play, reprenant à la lettre prêt le même concept. Celle de cette poupée, dirigée par une intelligence artificielle ayant péter une durite et contrôlant tout ce qui fonctionne sur réseau, et qui va justifier ses meurtres par son programme informatique de « Je dois coûte que coûte protéger l’enfant à qui j’ai été offert ». Oui, autant dire que M3GAN ne se foule clairement pas pour nous proposer un scénario qui sorte de l’ordinaire !
Surtout que le long-métrage tombe dans les mêmes travers que ses pairs, et surtout ceux du Child’s Play de 2019. Car si le sujet de l’intelligence artificielle semble être utilisé à bon escient, il est surtout traité de manière maladroite et incohérente. Et pour cause, si le fait que la poupée se mette à tuer pour protéger « son » enfant paraît logique, certains meurtres se révèlent être purement gratuits et illogiques. Tout comme les réactions même de M3GAN, qui joue avec ses victimes – au point d’exécuter une petite danse juste avant d’agir – et prend carrément du plaisir à commettre ses actes. Des constats qui donnent l’impression d’avoir une poupée à l’image de son long-métrage, à savoir en roue libre totale.
Et c’est justement grâce à cela que le visionnage de M3GAN arrive à être sympathique le temps de ses 100 minutes. Une sorte de plaisir coupable qui n’a que faire de toute logique et qui préfère plonger dans sa bêtise pour se présenter à nous tel un divertissement sans prise de tête. À l’instar du récent Malignant, de James Wan – tiens, tiens ! –, qui assumait ô combien son côté nanardesque sans se soucier une seule seconde du ridicule de son scénario et de ses situations. Certes, M3GAN est encore loin de la maîtrise et de la générosité de Malignant, car prenant beaucoup trop de temps à mettre en place son intrigue cousue de fil blanc et à se lâcher pleinement. Mais quand la poupée éponyme – ultra charismatique, soit dit en passant ! – se décide enfin à passer à l’action, n’ayant pas peur de lâcher quelques punchlines bien senties et à gesticuler vers ses victimes de manière menaçante, l’ensemble devient tout simplement jouissif. Débile, oui, mais suffisamment amusant pour donner envie de voir la suite.
Et avec un succès commercial pour le moins inattendu – surtout avec un certain Avatar : la Voie de l’Eau sorti quelques jours plus tôt –, il était évident que James Wan et sa coscénariste Akela Cooper daignent officialiser un second opus. Un nouveau volet qui, cependant, devra totalement lâcher prise pour que M3GAN puisse exploiter comme il se doit tout son potentiel de navet de luxe. Dans le cas contraire, ce premier film ne sera que les débuts d’une énième saga du genre apte à faire du surplace. À se contenter outrageusement du minimum syndical pour appâter les gens en salles. Pour le coup, il ne reste plus qu’à espérer que James Wan ait bien conscience du jouet qu’il a entre les mains. Car en l’exploitant comme il faut, le bonhomme a de quoi offrir au cinéma d’horreur une nouvelle poupée tueuse mémorable !