Les intelligences artificielles qui pètent les plombs, les robots qui prennent vie au delà de leurs fonctions primaires et les sales poupées sont trois thématiques assez communes de la science fiction, du fantastique et de l'horreur. Sans inventer la poudre le scénariste Akela Cooper (Hellfest – Malignant) sur une idée de James Wan décide de mixer le tout avec une sale poupée robotisée et blindée d'électronique. Cela donne M3gan, dernière production Blumhouse sur les écrans.
M3gan c'est donc le nom d'un jouet encore au stade expérimental, une poupée high-tech que sa créatrice Gemma décide de donner à sa nièce Cady, une gamine désespérée dont elle est en charge depuis la mort tragique de ses parents. Ce jouet qui est une poupée dotée d'une intelligence artificielle en constante évolution va vite devenir la meilleure amie de la petite fille tout en manifestant d'étrange comportements d'autonomie et de violence.
Le principal atout du film reste le personnage de M3gan lui même, un mélange improbable d'Esther, d'une Barbie, d'un Terminator, d'une poupée gonflable pour pédocriminels et d'un Google home, une poupée qui est clairement à la fois fascinante et inquiétante. J'ai d'ailleurs décidé d'aller voir le film en salles uniquement par rapport à la bande annonce et les scènes ou l'on voyait M3gan danser à la manière d'un pantin désarticulé tout bizarre ou courir à quatre pattes dans les bois comme un animal. La bande annonce m'aurait sans doute suffit tant il n'y a objectivement plus grand chose à voir une fois passé ses quelques séquences là même si le film n'est pas désagréable pour autant. Le personnage est clairement taillé pour le grand écran, il exerce une étrange fascination et j'aime beaucoup lorsque se dessine sur ce visage synthétique et lisse les légers signes d'une psychopathe qui se fout de notre gueule et d'une intelligence supérieure qui sombre d'un coup dans l'arrogance. Pour le reste le film reste assez classique dans sa trame et sa narration sans grandes surprises tant dans l'évolution des personnages que dans celle de l'histoire. Pourtant le film commence plutôt bien avec une fausse publicité assez cynique sur des vendeurs de jouets capable de refourguer à nos chères têtes blondes d’immondes peluches qui pètent et chient des billes le tout piloté par un smartphone. J'espérais alors un film dans cette veine un peu mordante et un peu critique sur l'industrie du jouet et le cynisme des multinationales du bonheur des enfants (enfin des nôtres pas celui de ceux qui les fabriquent en étant payés un bol de riz). Et honnêtement des idées et des pistes amusantes et pertinentes le film va en lancer plein, en prenant bien soin d'en explorer aucune. On nous parle de micros implantés dans les jouets pour espionner les désirs des gosses, d'une éducation à base d'écrans et de logiciels que l'on refile à nos enfants par paresse et manque de temps, des dérives de la domotique, d'espionnage industriel mais le tout se retrouve vite noyé dans des enjeux minimalistes : méchante poupée VS gentille tata découvrant l'amour maternelle. On sent même que le film met sa petite touche #Metoo lorsque notre brave M3gan mise sur le dos en forêt par un sale gosse qui commence à se mettre sur elle lui arrache l'oreille en lui disant que ce n'est pas une façon de traiter les poupées et que quand on commence comme ça on finit producteur à Hollywood ou encastré dans le pare choc d'une voiture.
Outre le fait que le film jette comme ça plein d'idées à la volée, il s'appuie malheureusement sur une galerie de personnage hautement caricaturaux. Le patron qui gueule tout le temps, la gentille collègue que l'on écoute pas, le sale gosse un peu gras qui insulte sa mère, le fourbe assistant mielleux qui bidouille ses petites affaires en sous main, la voisine insupportable … D'ailleurs le film est plutôt bien fait car dans un soucis qui ne traumatisera personne M3gan ne va finalement occire que des gens qui sont d'emblée montrer comme antipathique à l'écran dans un concept de méchante mais pas trop, ce qui est assez paradoxal dans un film d'horreur. Le film avance ainsi jusqu'à un dénouement un peu ridicule faisant intervenir un gros robot et une fin ouverte parce que merde on est chez Blumhouse et qu'une potentielle franchise est toujours bonne à prendre. Tout ceci est d'autant plus dommage que le film avait un véritable potentiel et aurait pu jouer avec l'inhérente cruauté de l'enfance prise au premier degré par une intelligence artificielle au service des plaisirs morbides et innocents des gosses.
M3gan n'est pas une purge désagréable, c'est juste un film qui n'a rien d'autre à proposer que son concept et son personnage effectivement plutôt réussi. En attendant M4gan, M5gan et M6gan on va se contenter des quelques plaisirs que procurent le film et attendre la suite (ou pas ).