Un thriller extrêmement prenant. Prenant place dans une Allemagne alors en pleine mutation, le film nous conduira dans cette chasse à l’homme avec un rythme globalement bien maîtrisé. Certes, ça mettra un peu de temps à se mettre en place, et le début peut souffrir de quelques longueurs dans les scènes, mais une fois les bases posées, le film restera haletant jusqu’à sa conclusion magistrale. Ce qui est marquant, outre la conclusion qui offre un cas de conscience et aborde la folie d’une façon à la fois inattendue et crédible, c’est l’atmosphère générale qui règne tout au long du film. Certes, c’est maintenant très classique pour du thriller à énigme, et ça peut même paraître un peu léger si on veut comparer avec du Fincher. Mais au-delà de ça, c’est le climat global qui règne dans le film, cette psychose qui se répand chez les gens, leur aptitude à condamner le premier qui se présente sans chercher à savoir s’il est coupable ou non, sans procès.


Il y aura après cette séquence en parallèle où le crime organisé et la police débattent de la situation, et où l’on aperçoit les motivations de chacun, mais aussi les contraintes qui se posent à eux. Chacun semble désemparé, chacun a bien conscience qu’il faille agir au plus vite, mais chacun va prendre des décisions différentes. Débute alors la chasse à l’homme à proprement dite, et là on ne peut qu’admirer le talent de Lang pour la mise en scène et la création de la tension, car au final, on finit par s’attacher à Hans, parce qu’on comprend assez vite ce qu’il cache en réalité. C’est peut-être l’époque différente qui crée cette dissonance entre nos propres réactions et celles des personnages du film, mais j’ai trouvé que ça participait au final à mieux créer la tension globale, montrant que le film est toujours d’actualité.


La chasse à l’homme est vraiment très bien maîtrisée, parce qu’elle prend bien le temps de s’installer et de devenir haletante, avec les moments de calme, puis ceux avec plus de suspens, jusqu’à sa conclusion qui aura presque un côté dramatique car on sait ce qui attend Hans. Ce qui conduit donc à la dernière partie du film, et une nouvelle fois, le talent de Lang permet de créer une scène mémorable et parfaitement maîtrisée, sans longueur. De plus, elle tranche avec le début du film, puisqu’on a droit à un véritable procès public même si le jugement est déjà acté, sans se soucier de la condition de Hans. Et en ça, j’ai trouvé que le film était de nouveau extrêmement d’actualité, avec les réseaux sociaux notamment. La conclusion nous laissera un peu sur notre faim, mais elle termine logiquement le film.


Je n’ai pas grand-chose à dire sur le casting, il est globalement bon mais je ne connais pas assez le cinéma allemand des années 30 (ou même du début des années 30 tout court, mine de rien c’est le 3ème film le plus ancien que j’ai regardé) pour juger, mais je dois reconnaître que Peter Lorre est vraiment impressionnant dans les facettes de son personnage. Son regard globuleux y aide beaucoup, mais dans son attitude aussi, il y a cette sorte de naïveté enfantine par moment ou quand on le sent complètement habité par sa folie (surtout lors de son procès). On pourra reprocher l’absence d’un véritable rôle féminin, mais bon ça ne dessert pas le film.


Techniquement, le film accuse certes son âge (notamment par rapport à la musique et au montage son), mais il n’en reste pas moins très efficace. Les décors participent à créer cette atmosphère propre au film, mais c’est surtout la mise en scène Fritz Lang qui révèle parfois du pur génie. Je pense notamment à sa façon de filmer les plans d’ensemble, mais aussi les dialogues entre les personnages, brisant presque le 4ème mur, ou encore la composition de ses cadres, utilisant parfois des ressorts propres au théâtre. Le jeu avec la lumière aussi prend une place importante, permettant ainsi de donner l’importance aux ombres. Il m’arrive souvent de voir un vieux film et de vouloir en faire un remake juste pour pouvoir améliorer sa mise en scène, mais paradoxalement, M le maudit ne souffre d’aucun problème à ce niveau.


Bref, M le maudit est un film intéressant et passionnant à regarder, qui nous entraîne dans son intrigue après un court moment d’introduction et ne nous lâche plus jusqu’à la fin. À voir !

Créée

le 4 nov. 2018

Critique lue 202 fois

vive_le_ciné

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