Pour lire la suite de ma critique dans le Huffington Post :
http://quebec.huffingtonpost.ca/jean-francois-mauger/furiosa-charlize-theron-mad-max-fury-road-feministe-feminisme-george-miller_b_7481848.html
Extrait:
«Sans mère on ne peut pas aimer, sans mère on ne peut pas mourir.» - Hermann Hesse, Narcisse et Goldmund, 1930.
Cette phrase de Hermann Hesse résumerait à elle seule ce dernier opus de la série Mad Max. La mère originelle - la Terre - est à l'agonie, la plupart des autres mères sont mortes et les survivantes sont en fuite dans ce monde apocalyptique, pas si surréaliste que cela. Frôlant de très près le plus radical des nihilismes, chaque être n'en finit pas de mourir... interdisant à chacun une possible ontologie.
Vous n'avez pas encore vu ce Mad Max? Voici quelques mots pour vous donner l'envie de vous déplacer le voir!
C'est du très bon Mad Max: trois lignes de scénario, un monde rock and roll, violent, bête, sanguinolent, sablonneux, épuré au... max!
Le scénario: Max et Furiosa, ainsi que les dernières mères, sont «pognés» - au sens littéral du terme - ensemble dans une machine de guerre pour fuir les vrais fous qui usent de l'eau, du pétrole et des armes pour régner sur un peuple d'esclaves qui les idolâtrent. Ça devrait interpeller pas mal de monde...
Sans mot dire...
On ne philosophe pas dans ce film, pas de traces de psychologie non plus, strictement aucun verbiage, tout est austérité, sécheresse, coups, peaux lacérées et hémoglobine. Logos a quasiment foutu le camp pour laisser toute la place à Topos: un monde apocalyptique où seul ce qui se fait «sentir» et interpréter est ce qui est montré, l'action que les uns et les autres font, ou ne font pas, pour transformer ou non ce lieu commun, écologiquement et humainement ravagé. C'est l'image qui est intelligente... Intéressant point de vue du réalisateur George Miller, père également des précédents Mad Max.
J'irai même jusqu'à dire que la parole est ici plutôt présentée négativement: la plupart du temps, lorsqu'elle est élaborée, c'est celle d'un pouvoir tortionnaire...
De la nature des essences
Dans un monde où ni l'amour, ni même la mort ne semblent être des options viables pour se soustraire à l'horreur, hommes et femmes recherchent un moyen de survivre, de résister aux pires souffrances, ou encore de s'enfuir en espérant rebâtir quelque part un meilleur monde.
Nous comprendrons pourquoi un des thèmes principaux est celui de la foi, des diverses «destinations» que celle-ci peut prendre dans une telle situation.
Les plus nombreux sont celles et ceux qui sont brisés, vivant dans la plus complète indigence et voués à une foi extatique qui les maintient dans le plus parfait immobilisme, la foi jouant un rôle médusant qui sidère l'esprit pour le rendre complètement inefficace.
C'est sur la route que va se jouer le véritable combat, dans l'action, entre ceux qui essaient désespérément de retrouver en eux l'essence qui rendait possible autrefois une certaine forme d'humanité, et ceux qui cultivent une autre essence, celle de la bestialité sur laquelle s'assoit leur «foi», source de pouvoir.
Au-delà de l'extrême violence du film, ce dernier raconte la complémentarité mais aussi l'opposition entre la nature animale et la nature spirituelle de l'Homme, d'où le grand chaos qui règne sur cette route unique...
Furiosa et les mères entretiennent une foi qui relève de l'ordre du magique, un élément extérieur, positif, une «bonne étoile» qui leur donne non seulement un supplément de volonté, mais qui pourrait éventuellement leur accorder une forme de rédemption si elles parvenaient à changer les choses, modifier leur destinée.
Enfin, il y a Max, qui n'a comme foi que la foi en l'autre, sans cesse à réévaluer dans un immense trou béant d'incertitude. Max, assumant sa culpabilité, la conséquence d'actes qui le maintiennent dans la plus grande solitude, ne croit guère à une possible rédemption.
Des hauteurs des féminismes
Dire que George Miller adopte une posture résolument féministe est un euphémisme. Le réalisateur embrasse plusieurs positions féministes dans son film, de la plus radicale - celle du clan isolé des femmes guerrières - à la plus «fraternelle» - celle des mères survivantes.