Daniel Hilarant
Madame Doubtfire avec son scénario prompt au quiproquos et autres malentendus est un des cultes de mon enfance. Encore un de ces films portant la mention « VHS usées ». On y retrouve un Robin...
le 19 mars 2012
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Voir Le cercle des poètes disparus hier m’a donné envie de voir d’autres films de Robin Williams ; et en revoyant après la vidéo d’Every frame a painting sur l’acteur, ça donnait presque envie de tous les voir, car peu importe la qualité du film, on voit que Williams y apporte à chaque fois son implication et son talent.
Bref j’ai opté en premier pour Mrs Doubtfire ; je l’avais en VHS quand j’étais enfant, mais je ne prévoyais pas le revoir jusque là, pensant que j’apprécierais beaucoup moins à l’âge adulte.
L’histoire, adaptée d’un livre, est plutôt originale : Daniel Hillard est un père privé de ses trois enfants suite à un divorce, et il a trois mois pour se trouver un emploi et un logement pour que le juge revoie son verdict en sa faveur.
Il ne peut voir ses enfants qu’un jour par semaine, et son idée pour y remédier c’est de se travestir en vieille femme pour occuper chez eux un poste de gouvernante. Naturellement.
C’est le genre d’idée qui peut marcher à l’écrit, mais tellement casse-gueule au cinéma… et pourtant, ça marche. Le maquillage de Mrs Doubtfire est très bon, alors que ça a dû être un vrai challenge de rendre Robin Williams méconnaissable, sans que son déguisement ne soit glauque.
En terme d’écriture, il y a les quiproquos auxquels on s’attend, les situations où Daniel doit jongler entre ses deux identités, et parfois s’accommoder des ratés de son costume. C’est souvent absurde, mais excellent ; les idées, le rythme, et le jeu de l’acteur concourent à rendre les gags hilarants.
Il y a certes quelques jeu de mots faciles et un petit manque de subtilité qui touche même les choix de la BO (on peut entendre "Dude looks like a lady", "Walk like a man", "Luck be a lady", oui bon…) mais les répliques sont pour la plupart énormes, et Williams rend hilarantes même les blagues les moins bonnes.
Je ne sais pas si le script a été écrit en ayant Robin Williams en tête, mais on pourrait jurer que c’est le cas. Il incarne un comédien qui a un goût pour les imitations, et étant adepte de l’improvisation, on sent que Williams a eu une grande liberté et qu’il a pu s’éclater dans son rôle, tout en laissant voir toute la variété de son jeu.
Le film s’ouvre sur une scène où il fait du doublage de cartoon, alternant entre les voix de deux personnages (une allusion probable à la suite des évènements), et bien que les gags soient bateaux, c’est là aussi la performance qui les rend drôles.
Daniel amuse la galerie en tant qu’acteur, il fait le clown pour ses enfants, mais il est aussi carrément touchant en tant que père aimant. Les scènes dramatiques sont poignantes ; je sais pas comment fait Robin Williams mais son jeu me met, au minimum, au bord des larmes dans chacun de ses films que j’ai vu ou revu ces dernières années (Hook, Will Hunting, Le cercle des poètes disparus). Il est d’une justesse incroyable, et c’est ce regard de clown triste, ces mimiques entre le sourire et la moue, qui laissent entrevoir une fragilité dans les moments tragiques, comme s’il était à deux doigts de s’effondrer.
On voit un grand enfant rattrapé par la réalité, et c’est ainsi que la rigolade laisse place au drame avec une efficacité désarmante.
Mais l’image que donne Robin Williams dans ce film, comme dans d’autres, c’est celle d’un type qui, malgré l’adversité, répond par la dérision à un monde austère et sérieux. Et j’adhère complètement à ce type de comportement.
On passe souvent, avec brio, d’une émotion à une autre, et les situations comiques ont beau être exagérées, Mrs Doubtfire est en revanche étonnamment juste dans son traitement du sujet du divorce. On y expose les réactions des enfants, tous d’âges différents, qui voient ça avec un regard plus ou moins naïf ("can’t you just say you’re sorry ?"), et les réponses apportées sont parfaites. Plutôt que d’en faire un simple prétexte pour l’intrigue, le sujet est visiblement abordé avec sérieux, comme si le but du film était finalement de réellement livrer un message aux enfants qui pourraient traverser ce type d’incident. Et bien que la morale finale soit livrée de façon assez cucul, le scénario fait preuve d’un bon sens surprenant, en évitant beaucoup de facilités.
Pierce Brosnan, très bien casté, est lui aussi hilarant en séducteur, tellement mielleux qu’on le pense forcément faux-cul ; on adore le détester et voir Daniel s’en prendre à lui. Mais au final, il s’avère ne pas être le sale type qu’on aurait voulu qu’il soit, évitant quand même ainsi un message manichéen. Et on n’a pas de happy-end classique et convenu, ce qui donne également plus de pertinence au propos ; après tout, les problèmes dans la réalité ne se résolvent pas avec autant de facilité.
Sur un autre sujet, j’ai aussi trouvé ça bien vu de faire des complices de Daniel un couple gay, sans non plus virer dans le cliché ; le film parle quand même plus ou moins de travestissement, ce qui n’est pas toujours montré sous un angle positif, mais du coup le duo de maquilleurs apporte un certain équilibre (et les acteurs ont aussi un bon potentiel comique).
Il y a une réplique de Daniel qui est pour moi très évocatrice de ce film, mais aussi d'autres de Robin Williams : "Don't patronize kids. They're little people (...) If it's something you'd enjoy, they'd enjoy it."
Mrs Doubtfire, voilà le genre de films familial que j’adore : c’est drôle et touchant, c’est appréciable même une fois passée l’enfance, et il y a un propos admirable. C’est typiquement une œuvre que je montrerais à mes gamins si j’en avais.
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Créée
le 14 oct. 2016
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