! SPOILER !
Le spectateur d'un film - comme le lecteur d'un roman d'ailleurs - est par principe un grand naïf qui n'a aucune raison objective de douter de l'histoire qu'on lui raconte, ni des images qu'on lui donne à voir.
Sauf que Park Chan-Wook est un malin qui s'est mis en tête de jouer avec ses propres règles narratives. Difficile, dès lors, de voir venir le premier coup de fouet - puis le second - que nous assène son scénario diabolique. D'autant que la mise en scène virtuose du réalisateur s'attache à nous servir un spectacle visuel hypnotique - superbe reconstitution d'un manoir coréen des années 30 - tout en s'appliquant à laisser hors-champ les éléments qui nous permettraient d'y voir clair dans cette histoire d'escroquerie à double sens.
Mais la force du hors-champ, de ce qui est caché, tu ou simplement suggéré n'est pas seulement le fait d'une mise en scène habile, elle s'inscrit également au cœur de l'histoire que nous raconte Mademoiselle. Celle d'une jeune fille littéralement soustraite au monde de l'enfance pour être plongée dans tous les sens du terme dans le hors-champ de la perversité normalement réservé aux adultes. D'où la duplicité du personnage alternant ingénuité et malice selon l'angle qui nous est donné à voir.
Hors-champ de l'imaginaire également avec ces hommes subjugués par les lectures de la geisha, hors-champ du langage dans le chassé-croisé des deux langues, coréenne (sous-titrée en blanc) et japonaise (sous-titrée en jaune) qui servent selon le locuteur à masquer telle ou telle information et hors-champ enfin du fantasme avec le fameux sous-sol, dont l'évocation menaçante par le maitre des lieux, "n'oublie pas le sous-sol" suffit à pétrifier de terreur la pauvre Mademoiselle tout en nous laissant imaginer de quoi il peut retourner. Puissance des images et des mots d'un côté, puissance du hors-champ et du non-dit de l'autre.
On reprochera justement à Park Chan-Wook, de ne pas s'en être tenu à cette ligne directrice en clôturant son film par deux scènes aussi ostentatoires qu'inutiles - la scène de torture dans le sous-sol, et l'étreinte torride des deux jeunes femmes - qui, loin de renforcer le récit et les personnages ont au contraire pour effet de les affadir. Dommage, c'est à mes yeux le seul défaut notable de ce diamant mutli-facettes.


Personnages/interprétation : 9/10
Scénario/histoire : 9/10 (méritait le prix du scénario à Cannes)
Mise en scène/réalisation : 8/10


8.5 /10

Theloma
8
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le 20 nov. 2016

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Theloma

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