Major Grom : Le Docteur de Peste est un film adapté du comic russe « Major Grom » édité par Bubble Comics. Le film adapte le premier arc de la saga, et, bien que je ne connaisse absolument pas le comic original, il le fait extrêmement bien.
Alors que le cinéma russe semble en pleine expansion, notamment grâce aux plateformes de streaming, il est autant qualitatif que rare (du moins, assez rare pour les néophytes comme moi). Le film est un concentré des meilleurs éléments d’un comic, distillés au sein d’une réalisation surprenamment bien maîtrisée, et couplés à des éléments cinématographiques parfaitement adaptés. Le scénario met en scène un flic rebelle et antisystème, au caractère loufoque mais étonnamment efficace, qui s’impose de sauver sa ville d’un justicier maladif qui y sème le chaos.
Bien entendu, le film reprend les codes du comic et ne réinvente rien : un (super-)héros obnubilé par la tâche qui l’incombe, ses acolytes un peu gauches mais finalement toujours utiles, un super-vilain sans foi ni loi qui dépasse les limites du raisonnable. Ce sont des éléments classiques que l’on retrouve dans n’importe quelle adaptation de comic, mais cette fois, à l’inverse d’un film DC Comics aussi bien foutu qu’une tour de dominos construite au sommet du mont Everest, ce film le fait avec une incroyable justesse et un dosage quasiment irréprochable. Les tonnes de clichés instaurés par le comic d’origine sont pleinement assumés et embellis par la réalisation, et même les gags les plus potaches ne sont jamais de trop. Le traitement du héros principal est vraiment réussi, tout comme le casting qui n’aurait pas pu trouver un meilleur acteur que ce dément de Tikhon Zhiznevskiy (qui apparaît d’ailleurs dans Shooters, un film mal foutu mais empli de nostalgie). Malgré son bat-les-couillisme constant, il devient vite très attachant et l’on trouvera toujours du plaisir à le voir malmener ses ennemis comme ses « amis » tout au long de sa quête.
Le grand méchant, lui, constitue clairement l’élément le plus cliché de l’histoire, mais le « retournement de situation » final en surprendra plus d’un puisqu’il est tout de même bien conçu et pas si évident qu’il laisse paraître. Son costume, autant stylé soit-il, fait un peu « justicier de grand chemin » et justement, le film s’en amuse et certaines scènes sont plus drôles qu’elles n’auraient dû l’être, provoquant des explosions de rire à des trucs complètement cons mais qui fonctionnent vraiment après avoir été happé par l’ambiance du film. L’humour est très présent et implémenté de différentes façons, certaines plus subtiles que d’autres, mais toujours avec un esprit assumé, avec notamment pas mal d’auto-dérision, que ce soit de la part des personnages ou carrément du film lui-même, offrant un visionnage léger et agréable. Le film a beau durer quasiment 2h20, les minutes filent à la vitesse du son, aucune scène ne venant plomber le rythme. Mention honorable à la scène qui enchaîne les visites du major chez de potentiels suspects, qui résume à elle seule le film tout entier : drôle, bien rythmée, bien exécutée et sans lourdeur.
En somme, Major Grom : Le Docteur de Peste est assurément un bon film, bien réalisé dans l’ensemble, dosé avec parcimonie, et qui apporte surtout un bon vent de fraîcheur face à des productions qui s’enterrent elles-mêmes (inutile de citer qui que ce soit ici…). L’œuvre est semblable à un film Marvel ou DC Comics (…et merde) dans le fond mais qui sait se différencier et s’élever dans la forme. Par ailleurs, le fait que le film soit russe et qu’il reprenne des codes de films américains pour les enjoliver à sa sauce procure une douce sensation de plaisir et de joie, et n’annonce que du bon pour le futur proche du cinéma russe actuel qui ne cesse de (me) surprendre. Et finalement, pourquoi n’inclure qu’une scène post-générique quand on peut en mettre deux à la suite ?