Il est rare que j'hésite entre mettre la note de 9 ou de 1, donc j'ai coupé la poire en deux.
Beaucoup de choses ont été dites, tellement qu'il y a des spoilers qui pullulent de partout et c'est vrai qu'il n'est pas évident de parler de ce film tant qu'on ne l'a pas vu.
Pour à la fois donner envie et prolonger le débat de 'navet' ou 'réussite', commençons déjà par s'intéresser aux scénaristes, amis du lycées, qui ont commencé avec le court SAW avant d'en faire un long. Comme dans beaucoup de leurs co-écritures et ils ne s'en cachent pas - et c'est aussi la raison de leurs succès, des franchises etc, à tel point qu'Hollywood embauche le réal pour faire 2 Aquaman - leur grande force est le mélange des genres.
Je reprends l'exemple de SAW, qui sur le papier est en fait une enquête/thriller mais c'est à la réalisation qu'ils ont choisi d'en faire un film d'horreur. Et ainsi de suite sur les autres films, avec cette idée qu'ils défendent : un film d'horreur, à un vrai fond, autant qu'un pur drame.
Et donc, avec Malignant, ils ont voulu reproduire cette fameuse recette (sûrement aussi pour le kiff, pour faire avancer ce cinéma de genre) ; je suis qu'au scénario ça passe ; mais c'est à la réalisation que le projet filmique va à contre courant de ses propres intentions :
- beaucoup trop d'effets spéciaux
- la mise en scène prend le dessus sur la narration
- le code de jeu va frôler, quand il n'embrasse pas, les pires acteurs qu'on a vu dans les pires nanards
- la triple mise en abime/métaphorique/retournage de cerveau pour faire passer la pilule du twist final est elle aussi, trop, trop appuyée, trop mise en place (comme s'ils s'étaient fait une checklist pour bien placer plein - là encore trop - de petits détails pas anodins)
- et à un moment, trop c'est trop, et bien que visuellement ça claque de ouf, tellement d'idées de ouf, ils ont mis tellement de levure, de jaunes d'oeufs, le four à 300 degrés que quand ils sortent le gâteau, ça donne un truc chelou et pas hypra digeste. ça se mange certes, mais une bonne tarte aux pommes aurait été bien meilleures. (vous voyez ce que ça fait des comparaisons de merde, bin euh ils font ça mais puissance 1000)
Le gros reproche que je ferais, c'est que les gars se sont trompés de genre. Il aurait d'abord fallu mettre celui de l'horreur à la poubelle ; le même scénario réalisé par Cronenberg, tout se serait passé de jour (ici le film est à 90% de nuit) ; si on garde Cronenberg à la réalisation, tout aurait été plus fin, moins distillé, moins gore, mois violent, pour justement insister sur cette sorte de dualité forcée que l'héroïne doit affronter. Parce qu'au final, c'est surtout un film psychologique, un thriller pur et dur, et en voulant en faire un film d'horreur, les gars loupent leur but, leur cible, foirent leur projet. Et c'est bien dommage parce qu'il avait sur la papier, un potentiel de dingue. En ouvrant plus larges aux genres, le films auraient aussi pu atteindre un champ plus large de spectateurs, et justement ceux qui n'aiment pas les films d'horreur, et aurait là encore sûrement eu le succès mérité.
Dans le premier acte du film, l'héroïne dit ''It's all in my head'' pour le coup c'est une phrase qu'on connait tous, qu'on se dit (à voix basse, dans sa tête, aux autres) et je pense aussi que les scénaristes sont restés dans leurs cerveaux (qui fusionnent ensemble à l'écriture depuis des années). Ils sont forcément partis du postulat de départ (le reste de leur travail le prouve) de faire un autre film d'horreur, mais différent, mais d'horreur, coûte que coûte. Bref, ils n'ont pas eu le recul nécessaire à un moment de la production/de l'écriture, et se sont pris les pieds dans le plat de l'autre et réciproquement et c'était trop tard.
On a dû leurs donner carte blanche (et pourquoi pas après tout) mais l'histoire est tellement de l'ordre de l'intime que, attention préparez-vous pour la suite je me lance dans l'impossible : à leurs manières, Les Frères Dardenne auraient fait un bijou de ce scénario.