Man in Black est un film sur le corps, c'est d'ailleurs l'objet central de la photographie du film, par la mise à nu littérale du compositeur chinois Wang Xilin. À 86 ans, dans un théâtre parisien, son corps performe, se contorsionne, s'émeut, s'exprime. Et l'on ressent bien comment l'âme est avant tout le fruit d'un corps profondément matériel.
Wáng Bīng met en lumière un contraste entre l'oeuvre de l'artiste et ce qu'il est en tant que corps. Les symphonies du compositeur viennent se superposer à son récit, parfois l'effacent, le dépassent. Ce que cherche l'artiste c'est à dépasser sa faible condition matérielle, il veut rejoindre par la création le régime de l'immateriel, mais cela passe toujours par la formation d'un corps capable de son propre dépassement.
Tout ça accompagne une critique du PCC racontée au travers de l'absurdité de la volonté du contrôle du parti sur ses intellectuels, y compris ses compositeurs. Ce contrôle va évidemment se matérialiser dans un rapport direct avec le corps des individus, que ce soit par la violence radicale de la fusillade, les suicides quasi forcés, ou les délires post-traumatiques.
Bref, Man in Black, est un merveilleux film à voir si l'on veut sentir un corps s'exprimer, dans tout ce qu'il a de plus humain.