Vraiment, Man on fire constitue une reprise involontaire du style néo-besson si parfaite qu’elle est proche de surpasser le maître (d’ailleurs, la comparaison avec Léon est évidente, seulement, dans son manichéisme, Léon développe intelligemment et de façon plutôt sensible ses personnages, alors qu’ici, on se prend du cliché non stop dans la gueule). Je passe rapidement sur le style visuel du film, complètement hideux (mais même les fans du film le reconnaîtront, nombre de ses passages souffrent d’un montage calamiteux et d’une musique digne de la purge auditive Death Race) pour me concentrer sur le contenu idéologique du film, à savoir que la fin justifie les moyens. Certes, dans tous les domaines (économique, politique, militaire), l’efficacité est prouvée. Et donc ici, dans le cadre d’un enlèvement, rien de change. Ces types ont enlevé la gamine et en ont probablement tué d’autre, c’est pas des rigolos. Du coup, Denzel se pointe et commence à exterminer leur famille, leurs proches, sur fond de musique rock’n roll parce que c’est l’heure de la vengeance des morts. Ca en serait presque drôle si le film ne croyait pas aussi sérieusement en son propos (franchement, c’est du Taken tout craché, le coup de l’exécution sommaire dans ta face…). Mais pendant la torture, Besson n’avait pas osé nous mettre du rock cool, c’est maintenant chose faite. Si l’effet voulu était de choquer davantage, c’est raté, on tombe dans une complaisance pour la souffrance digne d’un torture porn, or ce n’était pas vraiment le but initial…). Comme le héros se sacrifie, on va dire que son ardoise est redevenue blanche… Parce qu’il n’en est pas à son premier cadavre (d’ailleurs, vu comment Denzel les enchaîne, on comprend que c’est un vétéran, un vrai, et tout ceci nous mène donc vers un discours sur la Rédemption… Une rédemption à la Solomon Kane donc, mais avec des mexicains à la place des démons). Le thème de la rédemption constitue la principale profondeur du personnage de John, qui en dehors de ça ne fait pas preuve de beaucoup d’humanité. Il s’attache à une gamine, oui, et au nom de son beau sourire, fait sauter des dents à coup de crosse, fourre des explosifs dans le cul du commissaire (corrompu), le tout avec un sérieux si rigide qu’il en devient glaçant. Histoire de renforcer un peu le contexte du manichéisme, nous avons la bonne mère américaine (Radha Mitchell, mignonne) qui n’a que les larmes de son corps comme argument, et le père mexicain fanatique et si avare qu’il en vient à commanditer l’enlèvement de sa fille pour toucher une partie de la rançon. Mais qu’est-ce que c’est que ce rebondissement stupide ? Ca permet de donner un prétexte pour qu’il se suicide, car sa sale gueule de mexicain commençait à énerver le spectateur. Voilà clairement un personnage sacrifié auquel on n’accorde pas la moindre chance, sa mort est inutile, mais on lui accorde une importance telle qu’on ne peut l’ignorer… Malgré une ou deux idées intéressantes (le coup de feu en top départ), Man on Fire échoue complètement à créer du sentiment là où Léon y parvenait assez bien. Le problème d’alcoolisme de John n’est qu’une façade de départ, car du jour au lendemain, il lâche la bouteille pour prendre le fusil à canon scié et dégommer du kidnappeur à tour de bras. Il est toujours le héros monolithique, c’est juste qu’il avait oublié de se raser. Dans ce récit d’action qui semble avoir été écrit par le rédacteur de Faits Divers Criminels, plusieurs thématiques classiques, des rebondissements à foison et un rythme d’enfer, qui concurrence grandement Taken sur son propre terrain. Une conception de la justice finalement assez compréhensible.

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le 24 août 2014

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Voracinéphile

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