Benny, un collectionneur de vinyles est rencardé par un ami vendeur qui dit connaître un type cherchant à se débarrasser d’un disque rare de Charlie Parker. Ray, un amoureux transi, désespéré et honteux, est menacé par le frère de sa copine parce qu’il a balancé, pour se venger qu’elle l’ait trompé, des photos d’elle nue sur le net. Claire, une jeune chroniqueuse commence son premier jour sur une affaire de meurtre conjugal, associé à un collègue avide et sans scrupules. Wendy, étudiante féministe et insociable, discute avec sa meilleure amie de la souffrance dans le monde et de son orientation sexuelle. Et tout se déroule le temps d’une journée. De brutaux rebondissements côtoient de minuscules changements d’axes, au même titre que les histoires qui s’y déroulent dans le fond : Un meurtre, un suicide, une crise de couple, la découverte d’un milieu professionnel, une petite escroquerie, des idylles naissantes. Entre gravité et légèreté, tragique et comique.


 Si à première vues, le film brosse le portrait d’un New York hétéroclite et doux mais très solitaire, porté par des personnages pour la plupart célibataire ou en séparation, parfois passionnés, d’autres fois misanthropes, c’est vers l’union que le film glisse tout doucement, scandant la victoire de l’amour, de l’amitié ou de la confession, sans qu’on navigue non plus dans la comédie romantique, mais avec le constat que des couples se défont (Ce qui sous-entend qu’ils se sont jadis fait) et que d’autres se forment. Chaque personnage (Quatre au centre, une quinzaine en tout) déploie sa propre histoire, ses doutes, ses frustrations, finit par se confier, écouter l’autre, se remettre en question, trinquer. C’est la verve volubile d’un Woody Allen qui rencontre le cinéma mumblecore des Safdie saupoudré d’une pincée de finesse Hong Sang-sooienne.
C’est un film choral qui n’obéit pas vraiment aux fonctionnalités du genre, puisque les histoires ne s’enchâssent pas vraiment, sinon que chaque personnage évolue dans une énergie toute new-yorkaise (quel plaisir de voir autant les parcs, les rues, les trottoirs, les arbres, les feuilles mortes, surtout l’automne) et une tentation romantique, même si elle semble apparemment perturbée ou masquée. Super casting en tout cas, on reconnaît pas mal de monde : Michael Cera, forcément, qu’on a l’impression de pas avoir vu bouger/vieillir depuis Supergrave ; Michaela Watkins, qu’on a croisée dans la série Casual ; Benny Safdie, qui joue dans les films de son frère ; Isiah Whitlock Jr. qui jouait un sénateur dans The Wire ; Philip Baker Hall, qu’on a déjà vu un peu partout, même si c’est le genre d’acteur dont on retient ni le nom ni les rôles. Mais c’est finalement ses quatre personnages principaux qui permettent de faire quatre belles découvertes : Bene Coopersmith, qui joue Benny, Abbi Jacobson qui incarne Claire, Tavi Gevinson (sorte de fusion ado entre Scarlett Johanson et Jean Seberg) pour jouer Wendy, George Sample III qui joue le rôle de Ray. Bref, tout le monde est génial là-dedans.
Chacun des personnages se retrouve bousculé par la temporalité – Que le film viendra maintes fois symboliser par ce magasin d’horloges, dans lequel on a rapporté la montre de la victime (d’un crime passionnel ?) pour la réparer. Si Benny, le personnage le plus fantasque du film (qui court après un disque, puis après le faussaire qui a tenté de lui refourguer un faux) achète une chemise violette et tente de savoir auprès de tout le monde si elle lui va, c’est moins pour créer un joli running-gag gratuit que pour ouvrir sur un final magnifique où il rejoint son rendez-vous amoureux, qui lui fera oublier ses déboires du jour avec le disque rare de Charlie Parker. Une déclaration d’amour comme il est rare d’en voir au cinéma. Je voudrais revoir le film ne serait-ce que pour avoir la chance de revoir ces cinq dernières sublimes minutes.
JanosValuska
7
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le 6 nov. 2018

Critique lue 280 fois

JanosValuska

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