Comment, petit spectateur, tu ne sais pas ce qu'est la dadaïsme ?
Qu'à cela ne tienne. Tu vas avoir un petit cours de rattrapage par pas une, ni deux, mais bien DOUZE Cate Blanchett. Ben oui, parce que nous on veut parler d'art confronté à la société moderne, tu vois ? Du coup, il nous faut les avatars de cette société: le clochard (crise économique oblige), la famille chrétienne, la gothique, l’institutrice, la chorégraphe de ballet... Et comme notre truc à nous, c'est la subversion, eh ben ces personnages de la vie de tous les jours vont déclamer de véritables manifestes d'artistes dans des situations de la vie quotidienne. Genre la maman, au lieu de prier avant de manger, elle nous dit que l'art c'est le rejet des conventions, tout ça. Pareil, à l'enterrement, au lieu de faire un discours mortuaire, Cate elle surjoue comme si sa vie en dépendait en nous rappelant à notre insignifiance. Ah et le mieux, c'est clairement la gothique. Elle fait tellement fi des bonnes mœurs qu'elle fume, s'habille en noir, et fréquente des squats de musiciens. Dark, on vous dit. L'art, c'est pas quelque chose de lisse, hein. C'est de la merde, du pus, qui peut suinter de n'importe quel humain insignifiant, de n’importe quelle action banale. Pis si tu l'as pas encore compris, il reste 1h de film pour t'en convaincre.
Mais le discours c'est bien beau, mais le spectateur il veut aussi des fulgurances visuelles, de l'expérimentation à tous les niveaux, quoi ! Du coup, à un moment, c'est dingue parce que la Cate en combi anti-radiations, elle se retrouve dans une pièce avec des formes géométriques trop bizarres, et puis au dessus d'elle, y a le monolithe de "2001" qui flotte, mais à l'horizontal, cette fois.
Mais c'est ok, parce qu'à la fin, la maîtresse, elle dit à ses élèves que "c'est pas grave de copier une idée tant qu'on s'en sert pour faire un truc stylé" (en gros). Ah bah ça va, le cadavre de Stanley se porte bien alors, merci pour lui.
En fait, le tout est tellement conventionnel, rébarbatif et dénué de tout intérêt qu'on pourrait presque se demander s'il ne s'agit pas d'un (très) long clip pour se foutre de la gueule de l'art contemporain. Mais bon, il paraît que ça veut se prendre au sérieux, alors que c'est juste ridicule.
Le ridicule, c'est quand tu essaies de convaincre pendant 1h30 ton public que ce que tu fais est une oeuvre importante, originale et subversive mais que ladite oeuvre ne l'est aucunement.
C'est quand tu ne parviens jamais, même pas une micro-seconde, à faire RESSENTIR (et non pas "entendre") quelque chose. Parce que oui, ces manifestes sont fascinants, et l'oeuvre de créateurs visionnaires. Mais nous les faire ingérer comme ma prof de français de 4ème nous faisait apprendre nos poésies sans nous donner une seule fois la possibilité d'en mesurer la signification, la porté, c'est inutile, en plus d'être prétentieux et hautain.
Je mets 3/10 parce que j'ai un peu ri à la scène avec la présentatrice du JT, que y a quelque beaux plans, et que je suis trop gentil. Et puis aussi parce que je pense que le pauvre mec qui a pondu ce truc ne comptait pas le diffuser au ciné de base (il se portait bien à le projeter sur les murs de sa galerie d'art contemporain) et qu'il a fini par se laisser convaincre.