Le problème avec les remakes, c’est que la comparaison avec l’original est inévitable… Comment oublier les ombres gigantesques de Raimu, Charpin et compagnie devant les frêles ectoplasmes que Daniel Auteuil nous sert en guise de substituts ? Il y avait pourtant un domaine où il pouvait sans gros effort surpasser l’original : celui de la mise en scène, que Pagnol, faute de maîtriser suffisamment l’outil cinématographique à ce moment-là, avait confiée à Alexandre Korda, honnête artisan sans plus. Raté ! La mise en scène d’Auteuil est aussi plate et banale que celle de son prédécesseur. Quant à sa direction d’acteurs, elle vaut également celle de l’original, c’est-à-dire qu’elle est inexistante. À la différence que, Pagnol ayant écrit ses textes en pensant à ses futurs comédiens, ceux-ci n’avaient pas besoin d’être dirigés puisqu’ils n’avaient qu’à être eux-mêmes. C’est évidemment loin d’être le cas ici. Victoire Belezy est une bien jolie Fanny mais n’apporte strictement rien d’intéressant au rôle. Raphael Personnaz, Marius beau gosse mais sans épaisseur, copie Pierre Fresnay au point de parler avec un accent simili provençal mâtiné d’une pointe d’accent alsacien ! Darroussin fait ce qu’il peut mais a l’air bien étriqué dans ses habits de Panisse… Quant à Daniel Auteuil, il a dû vite se rendre compte que le costume de Raimu était trop grand pour lui. Alors il boule des répliques énormes, les affadit, en ôte toute la substance. À coup sûr, Marie-Anne Chazel est celle qui s’en sort le mieux en revisitant et modernisant le personnage d’Honorine qui devient du coup plus important… Du côté du scénario, signalons des scènes cultes de la première moitié du film entièrement supprimées de façon inexplicable au profit d’autres, censées sûrement faire « plus cinéma et moins théâtre filmé »… quant à la partie de cartes, elle est particulièrement fade et sans saveur ! Pour être juste et terminer sur une note indulgente, reconnaissons que la deuxième moitié est un peu plus personnelle et que la fin contient une vraie dose d’émotion. Mais on ne reconnaît pas grand-chose du Marseille des années trente où l’action est censée se passer et l’esprit de Pagnol semble si loin que le générique de fin est accompagné de… La Mer, de Charles Trénet !… Ils sont vraiment fadas, ces Parisiens !