A sa sortie, en 1996, nous ne savions pas que ce petit OVNI qu'était "Mars Attacks" marquait plus ou moins la fin de la meilleure période créatrice de la carrière de Tim Burton. Nous avions été enthousiasmés par cet hilarant et terrible règlement de comptes avec la bêtise américaine, surtout lorsqu'elle se transforme en politique : pas si loin finalement du travail que Kubrick avait réalisé avec son génial "Docteur Folamour" (mais sans l'apocalypse finale, ou alors une pure apocalypse de l'intelligence...), ce film représentait l'antithèse "freaky" de l'épouvantable "Independance Day". Quelque part il nous laissait espérer que nous avions suffisamment d'amis américains intelligents et fans de "pulp fiction" pour que le monde ne sombre pas complètement !
Grinçant, délirant, méchant et drôle, "Mars Attacks" était un bonheur visuel total pour les nostalgiques - comme Burton - d'une esthétique très fifties, habilement transposée avec brio de nos jours : les décors, les couleurs, les effets spéciaux, les costumes, tout participait à créer un tourbillon kitsch jubilatoire, que venaient régulièrement troubler des scènes cruelles assez électrifiantes (la violence, bien que répondant aux conventions outrancières de la Bande Dessinée, n'y étant jamais insignifiante...).
Mais "Mars Attacks" n'est pas non plus un film qui vieillit aussi bien qu'on l'aurait espéré, sans doute parce qu'il lui manque une certaine véracité humaine, une véritable émotion qui était pourtant toujours présente jusque là dans le cinéma de Tim Burton : entre une famille white trash haïssable et des politiciens abrutis, en passant par des arrivistes obsédés par la réussite financière, le portrait à charge des Etats-Unis était sans doute par trop simpliste, et il est impossible de s'attacher à aucun des pantins qui s'agitent sur l'écran (même si Burton a clairement essayé de créer ce lien d'affection avec la famille black...). Bref, entre caricature un peu grossière et jeu de massacre (auquel le spectateur adhère bien entendu), "Mars Attacks" propose certes beaucoup de plaisir régressif mais assez peu de Cinéma.
[Critique écrite en 2017 à partir de mes notes de 1997]