Contrairement aux autres films cultes du genre, qui sont tous plus ou moins surestimés (Cannibal Holocaust, L'Exorciste ou Evil Dead), ce classique reste toujours terriblement efficace. Dès les premières images du prégénérique, on est plongé dans l'ambiance.
Car, qu'on ne s'y trompe pas, c'est avant tout l'ambiance qui est horrible dans ce film. Bien sûr, il y a bien, de-ci de-là, quelques images un peu sanguinolentes, mais si vous cherchez de l'hémoglobine par hectolitres et des entrailles qui se répandent par terre, vous risquez d'être déçus. Par contre, vous allez être plongés dans le monde de la folie la plus malsaine.
Massacre à la tronçonneuse nous rappelle aussi qu'un film peut avoir été réalisé avec un budget ridicule (83.500 dollars selon IMDb) et être très travaillé quand même. Le travail de Tobe Hooper est remarquable. Ses plans, son montage, sa bande son, tout contribue à atteindre l'objectif qu'il s'est fixé. Même les dialogues.
Ainsi, dès les premières minutes, on nous parle de profanations de cimetières et d'abattoirs, on rencontre un auto-stoppeur dégénéré et sadique et on est écrasés par une insupportable chaleur. Puis on se rend compte qu'on est perdu au milieu de nulle part, dans un endroit tellement isolé que la notion même de civilisation paraît étrangère. Une maison perdue et délabrée, peuplée de hordes d'araignées. Et une autre maison, décorée avec goût. La réalisation atteint ici une certaine horreur gothique proche de Dario Argento.
L'horreur vient donc de ce monde (fort heureusement) perdu dans lequel nous plongeons. Les objets suspendus aux arbres et les ossements répandus un peu partout rappellent d'antiques rituels païens. La frontière entre humains et animaux est abolie (la première victime est tuée comme du bétail à l'abattoir, et on entend un bruit qui ressemble au cri d'un cochon). Pire encore, la frontière entre la vie et la mort ne semble plus vraiment exister.
Ce monde obéit à ses propres règles, loin de notre logique et très loin de notre morale. Ici, la folie la plus dégénérée, l'insanité la plus amorale et malveillante est la règle. ce monde reculé et renfermé sur lui-même obéit à sa propre éthique. C'est cette folie inhumaine, qui culmine dans la scène du repas, qui rend le film aussi traumatisant.
Une seule énigme reste, maintenant que la tempête est passée. Est-il normal que les "acteurs" jouent aussi mal ? Alors que la réalisation est aussi maîtrisée, j'ai du mal à croire que Hooper ne s'en soit pas rendu compte. Ce serait donc volontaire ?
[pour des raison évidentes, je ne vais pas recommander ce film, mais c'est une expérience cinématographique unique et éprouvante]