Ayant vu pas mal de film des Wachowski ces temps derniers, à savoir Cloud Atlas et Jupiter Ascending, il fallait que je me replonge dans ce beaucoup reconnaissent comme leur plus grand film, Matrix. Et en réalité, j'y retrouve déjà tous les éléments qui m'ont agaçé dans leurs autres longs métrages : beaucoup de vide sous un enrobage sympa.
Matrix est un plaisir geek, voilà tout. L'idée de départ est intéressante, sans être totalement transcendante à mon goût - ce ne sont pas les premiers à avancer qu'il est possible que la réalité soit autre et que l'on vit dans un monde virtuel ou une dimension parallèle. Mais pourquoi pas après tout. Le film commence d'ailleurs très bien, puisqu'il introduit cette idée au-fur-et-à-mesure. Le spectateur est forcé de s'accrocher un peu, face à des personnages exubérants, des phénomènes étranges. Il apprends la "vérité", au travers du novice héros, programmateur un peu minable. Puis, ce long incipit se termine par le très célèbre speech du mystérieux Morpheus sur la pilule bleue et la pilule bleue où l'on comprends enfin un peu tout.
Et c'est là que le film devient d'une banalité affligeante, sauvé tout juste par son aspect spectaculaire et quelques scènes plutôt sympas. En effet, Néo le personnage principal, incarné par un Keanu Reeves que je trouve toujours aussi apathique, est l'élu qui débarrassera le monde réel des machines qui ont pris le pouvoir et réduit les hommes en esclavage au travers d'une matrice, notre monde, en réalité un artifice. L'histoire est donc banale. Encore un héros venu sauver le monde.
Heureusement que quelques acteurs sont là pour incarner un peu le tout : Hugo Weawing, incarnant le personnage culte M.Smith, un programme chargé de traquer les hommes qui ont conscience que la matrice existe. Le personnage de l'oracle est plutôt sympa également. Mais à côté de ça, c'est un univers froid, sans âme, sans émotion, une atmosphère cyber-punk verte et très sombre, faites de poubelles et de tuyaux (par contre la BO est superbe !). Vous me direz que c'est fait exprès, pour montrer la noirceur de la réalité. Oui, mais un film ce n'est pas que des ralentis sur des douilles qui tombent, des mouvements de caméra circulaires, très fort techniquement, je l'avoue, "badass" à souhait, mais au final assez vains.
Certes, on trouve quelques références philosophiques. Platon, par exemple, dont le fameux mythe de la Caverne est finalement l'idée centrale du film, voir par delà l'illusion. Le choix aussi qui renvoie à Pascal, le surhomme qui renvoit à Nieztsche et évidemment la robotique et l'intelligence artificielle, qui sont les sujets du film. Mais voilà, derrière ses grandes idées, vaguement assimilées par les réalisateurs, il y a les gros sabots, une tendance finalement des films à gros budgets actuels, remplis de références pour combler un certain vide. La sobriété manque à certains de nos réalisateurs contemporains qui pensent distiller une philosophie et des messages profonds comme l'aurait fait un Kubrick. Mais n'est pas Kubrick qui veut.
La réalité c'est que se qui caractérise les Wachoski, c'est d'abord l'action, le plaisir S.F. pur, l'univers geek et jeux vidéos, les plans spectaculaires voire impossibles, les ralentis, les scènes d'actions mélangeant les genres (western, kung-fu). C'est la caractéristique de leur cinéma, techniquement très bon, intellectuellement un peu bidon, les messages distillés se noyant dans ce brouhaha d'affrontements et de dialogues assez creux.
Je vais me faire assassiner par les fans de cette saga, qui est culte, je le reconnais. J'ai passé un bon moment en le revisionnant mais je n'ai ressenti ni de souffle épique, ni d'introspection, ni de chaleur et de véritable passion dévorante. Matrix n'a ni la force de blockbusters comme Inception ou Interstellar, qui à défauts d'êtres des chefs-d'oeuvres poussent la tension à son comble et il a encore moins la force d'un film philosophique sur la réalité, le rêve, le mystère divin, loin de la sophistication d'un Mulholland Drive de Lynch, loin des mystères d'un 2001, loin de la beauté d'un Blade Runner. Les Wachowski ce n'est pas ma camme, voilà tout.