Samedi 6 avril 2013.
15h34.
Le générique s'affiche, le son retombe. Alex a fermé les yeux pour toujours. Anna pleure et court, une empreinte de main rouge sur la joue droite. Cette main rouge que je retrouve sur ma joue tellement la claque est forte. Ma bouche est grande ouverte. Je viens de passer deux heures, submergé par une poésie magnifique et sublimée par des images splendides. Mauvais sang vient de s'achever et vient de bousculer mon petit monde cinématographique.
Samedi 30 Mars 2013
22h49.
Je viens de rentrer dans le monde de Leos Carax avec Holy Motors. J'ai adoré. Je ne demande qu'à visionner le reste de sa filmographie. J'en discute avec un de mes professeurs qui me conseille Mauvais Sang. Je récupère le dvd et me lance dans le visionnage quelques temps après.
Ce qui est fabuleux dans Mauvais Sang c'est la façon qu'à Carax de se passer de son intrigue pour pouvoir se concentrer sur la poésie et la romance entre Alex et Lise puis entre Alex et Anna. Dès les premières minutes on se rend compte de la beauté des paroles. la première chose que l'on entend n'est autre que la voix de Ramuz un poète suisse. Carax nous démontre ici sa culture qu'il va disséminer tout le long du film et même dans sa filmographie en général. Par exemple on retrouve l'omniprésence du symbole de la croix, référence ouverte à Scarface d'Howard Hawks.
L'hommage au vieux cinéma est d'ailleurs à nouveau répété avec la scène magnifique de la femme et du bébé. Tout au long de la séquence on a droit au thème de Limelight de Chaplin, et le climax se situe sur la fin où Alex se substitue à l'enfant. C'est magique et un peu plus si l'on se souvient que dans Limelight le vieux clown comparait ses nouveaux premiers pas à ceux d'un enfant de deux ans. On retrouve bien ça dans cette scène.
Et puis bien sur je ne pourrais pas parler de ce film sans mentionner cette danse effrénée dans laquelle se lance Alex, après avoir été pris de violents maux de ventre, sur Modern Love de David Bowie. Cette course est d'autant plus belle qu'elle est soumise à un clignotement constant de par la présence des bandes rouge derrière Alex. Le travelling est rapide et authentifie les prouesses physiques d'Alex. Cette course va crescendo. on a d'abord Alex pris de tourments lors des premières notes de la chanson, comme attaqué par l'amour qu'il ressent pour Anna. Puis il se libère au fur et à mesure de sa course, criant son amour au monde entier et au ciel. L'amour est fort et la séquence est magnifique. Le concentré d'émotion qui se dégage de cette scène est juste hallucinant.
Et puis il y a cette manière de traiter de l'amour. L'amour qu'Alex aperçoit dans le bus sans pour autant apercevoir le visage de cette femme en blanc. L'amour semble présent mais pourtant il ne la voit pas vraiment. On se rendra compte, ou du moins on devinera que cette femme n'est autre qu'Anna. Il y aura donc eu 2 pré rencontres sans se voir vraiment puis une rencontre réelle. On a le contraire du grand coup de foudre avec un jeux de regard puissant et fixe. Ici les regards sont rapides et distants de par les situations qui leur sont présentées durant leurs pré rencontres. On ne peut donc pas vraiment dire qu'il y aura eu une vraie rencontre et un vrai coup de foudre entre Alex et Anna. Pourtant leur amour est fort même s'il leur est interdit.
Et ça y est je revoie Anna courir à la fin, comme essayant de rejoindre Alex, laissant exploser ses sentiments et me voila repris de mélancolie. Cours Anna, cours et rejoint le aurait on envie de lui crier. Mais c'est trop tard, bien trop tard.
Probablement l'une des plus belles (si ce n'est la plus belle) romance qu'il m'ait été donné de voir. Le cinéma n'a jamais été aussi beau.
(Ai-je mentionner que Denis Lavant est un des plus grands acteurs de sa génération ?)