Décidément, peut-être pour répondre à l'ensemble d'une classe moyenne d'employés à la recherche d'un bon exutoire à sa frustration grandissante et bien réelle, la satire très noire "de bureau" où tous les prétextes sont bons pour faire de joyeux massacres entre collègues de travail est presque en train de devenir un sous-genre de l'horreur (et de la comédie horrifique notamment) à part entière vu sa prolifération croissante.
Après le très sympathique et plus sérieux "The Belko Experiment" de Greg McLean, c'est au tour de Joe Lynch, déjà connu pour un autre huis-clos jonché de cadavres ("Everly") de s'attaquer à un nouveau carnage en milieu professionnel.


Ici, plusieurs foyers de contamination d'un nouveau virus ID-7 éclatent à travers le monde. Ses symptômes se traduisent par une désinhibition complète de nos émotions et un retour aux plus bas instincts de l'esprit humain capable d'amener aux pires extrémités. Un traitement a été découvert mais il met huit heures à agir et les malades doivent être gardés en confinement sur le lieu de l'épidémie pendant cette durée en attendant leur guérison.
Employé d'un grand cabinet juridique qui a lui-même participé à la mise en place d'une jurisprudence déclarant l'impunité pour les actes commis par les personnes exposées au virus (y compris le meurtre sinon ce n'est pas rigolo), Derek Cho se retrouve victime d'une machination de ses employeurs faisant de lui le parfait bouc-émissaire d'un dossier explosif pour l'avenir de l'entreprise. Alors qu'il est sur le point de quitter le bâtiment après avoir été licencié sans ménagement, le virus ID-7 se proprage parmi tous les étages de l'immeuble. Cédant comme tout le personnel à ses instincts les plus primaires, il décide d'en profiter pour fomenter sa vengeance envers la direction avec l'aide d'une jeune femme également flouée par la société...


Bon, alors oui, il manque clairement le passage d'un palier supplémentaire dans la folie à "Mayhem", sur sa violence graphique par exemple, pour pouvoir devenir un hit mais l'essentiel est là : le film de Joe Lynch est un bon défouloir à la hauteur de son pitch et qui fait le job pendant l'essentiel de sa durée !
Emballé avec une belle énergie qui n'est pas sans rappeler un certain Edgar Wright (la patte du réalisateur de "Shaun of the Dead" a décidément marqué le ton ou le montage des comédies horrifiques pour un bon moment), "Mayhem" joue évidemment à fond la carte de la caricature de lutte littérale des classes où les sulbaternes disposant encore d'une once d'humanité prennent leur revanche sur leurs supérieurs présentés comme une quasi-oligarchie démoniaque et coupée de la réalité du monde. Allant jusqu'à incarner toute la caste dirigeante en figures maléfiques (le DRH en faucheur, la cadre frigide en sirène, le PDG et son conseil digne d'un vestibule de l'Enfer), le discours de fond dans sa globalité n'est bien sûr pas à prendre avec le plus grand sérieux du monde mais force est de constater que le film sait se montrer pertinent dans sa métaphore du fonctionnement d'une grande firme où les employés ne sont qu'une masse de figurants interchangeables avalés et manipulés par des intérêts qui les dépassent.
L'esprit de cette revanche réside donc dans l'alliance de son héros Derek, encore tiraillé par un système dont il a épousé les codes et la réalité de n'être qu'un pion dans un système plus vaste, et de son acolyte de fortune, Melanie, une des nombreuses victimes de cette société où les intérêts des particuliers n'ont plus aucun sens. Particulièrement réussi, le duo interprété par les excellents Steven Yeun ("The Walking Dead") et Samara Weaving (cette furie blonde, sosie d'Eva Green et nièce de l'acteur Hugo Weaving, paraît avoir un vrai penchant pour les rôles de frappadingues depuis de "The Babysitter", on ne s'en plaint pas !) se lancera dans une aventure en forme de jeu vidéo jubilatoire où chaque nouveau niveau franchi se verra gardé par un dangereux boss et des sbires avec un univers et des caractéristiques qui leur sont propres.


Entre des dialogues capables de passer à du Motörhead à une citation de "Risky Business" en un quart de seconde et des affrontements jamais avares en surprises, "Mayhem" est une chouette cour de récréation où même les figurants en arrière-plan s'éclatent à faire n'importe quoi pour représenter leur passage dans la démence.
Avec plus de maîtrise et un passage total dans la folie au lieu de se cantonner trop souvent à y jouer près de sa frontière, le film avait sûrement les moyens de prétendre à plus mais, en l'état, on s'y marre bien et ce n'est déjà pas si mal...

RedArrow
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le 16 juil. 2018

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