Le réalisateur jusqu'ici talentueux d'Ex Machina et Annihilation s'essaye au genre horrifique et c'est... Grotesque.
Grotesque, dans le pire sens du terme. Car le grotesque peut tout à fait être bien utilisé, comme par exemple dans Get Out qu'on peut comparer à ce fillm en ce qu'il se sert aussi de l'horreur pour dénoncer une grande thématique (le racisme), et où l'aspect grotesque du récit est subtilement intégré et dosé pour nourrir l'horreur. Dans Men, le grotesque est involontaire, c'est un film tellement persuadé qu'il apporte une reflexion intéressante sur le machisme qu'il la répête ad nauseum dans un infini lourdeur.
C'est vraiment cracher sur l'héritage de Cronenberg et tous ceux qui ont su utilisé intelligemment le body horror que le dernier segment du film d'où le symbolisme à deux balles est d'une stupidité sans nom.
C'est vraiment dommage, car ça commence plutôt bien, le réal utilise joliment la saturation de couleur pour instaurer une étrange atmosphère. Mais quand est-ce que ça dérape ? Ma théorie est que ce film est un dérapage continu, et qu'à chacun sa scène où l'on finit par s'en apercevoir (pour ma part, je dirais la scène de la rencontre avec le prêtre).
On peut lire ici et là que ce film est féministe. Alors, il est indéniable que oui, il se veut féministe. Mais quand on voit à quel point qu'il construit son récit sur des poncifs pontifiants, où chaque figure masculine n'est qu'une case à cocher, on a plutôt l'impression d'avoir affaire à un manuel de la masculité toxique pour les nuls, auquel il faut ajouter un bon vieux "non mais les hommes sont tous mauvais c'est dans leur nature tu comprends c'est pas du tout une question de conditionnement social donc les femmes bah elles ont plus qu'à faire avec c'est comme ça on n'y peux rien". Bref, féministe ? Plus le film avance, plus on finit par sérieusement en douter.
Men, le titre résume tout le film. C'est le film d'horreur que c'est d'être une femme. Alors, dis comme ça, pourquoi pas? Mais je pense que seul un mec pouvait pondre un film aussi lourdingue et racoleur sur le sujet.
Que dire aussi de l'horreur justement ? Eh bien, qu'elle est on ne peut plus cliché. Quand le summum de tes effets, qui d'ailleurs préfèrent toujours le puérile jumpscare à l'instauration d'une atmosphère réellement angoissante, c'est la lumière qui s'éteint et qui s'allume (Bouh!) et un mec tout nu (d'ailleurs subtilisé à un film comme Hérédite qui l'utilise statosphériquement mieux), bah c'est juste que t'es nul en fait. Allez, j'admets quand même que le truc de la main, c'était un poil original la première fois qu'il s'en sert, mais vu qu'il le réutilise en mode buffet à volonté ça nous ramène au grotesque que je mentionnais précédemment. Même remarque pour le grand truc du climax qui rappelle le célébre adage "Tu peux piéger une fois mille personne, mais si tu répètes cinq fois le foutu même effet, tu nous prend juste pour des nulos". Quand je vois que certains ose comparer ce long-métrage à Titane et Crash... Non mais franchement, il n'arrive pas au centième de la cheville de l'ongle de leur petit orteil.
Sérieusement, ce film est dû genre à remettre en question ce qu'on croyait savoir du réalisateur. Moi qui croyais avoir eu affaire avec Annihilation et Ex Machina à d'intéressantes propositions renouvelant le genre de la SF, je ne peux que craindre qu'ils étaient plus vide que je ne le pensais quand on voit l'absolue débilité du propos de Men. Il n'y a plus qu'à espérer que ce n'était qu'une erreur de parcours pour Alex Garland.