Les chats s'étripent au clair de lune

Sois prévenu petit curieux, ici pas de jérémiades larmoyantes ni de rédemption en carton, bienvenue à HK, Men from the gutter c’est du polar poisseux, sec et nerveux qui préfère l’action à la narration, la poésie frénétique d’un corps qui s’éteint aux lourdes tirades interminables. 80 minutes, c’est tout ce dont a besoin Lam Nai-Choi pour tapisser d’un pourpre chaud le coupe-gorge poisseux qu’est Hong Kong, cité grisonnante devenue le théâtre de jeux dangereux entrepris par des âmes meurtries en quête de réparation. Casse en préparation d’un côté, vengeance brutale de l’autre, il n’en faut pas plus pour captiver l’attention. La galerie de personnages est réduite, les enjeux dramatiques également, peut alors complètement s’exprimer le cœur musclé d’une bobine à l’énergie folle qui fait la part belle à une mise en scène propulsée à la strychnine.


C’est armé d’une caméra sur ressort que Lam Nai-Choi met en images son jeu du chat et de la souris entre truands déterminés et flics consciencieux, rappelant, à qui aura la bonne idée de se rassasier du spectacle, tout le panache du cinéma HK et sa caractéristique première : s’exprimer à chaque instant dans l’action. Qu’il s’agisse de filmer un salopard prendre la poudre d’escampette en jouant du rappel sur la façade d’un immeuble qui touche le ciel ou de capter la poudre qui sort des flingues d’une vingtaine de petits cabotins bien décidés à se trouer mutuellement la peau, le savoir-faire de ce cinéma bien particulier impressionne, et celui de Lam Nai-Choi plus précisément.


Un certain nombre d’amoureux du polar hardboiled HK considèrent Men from the gutter comme un incontournable du genre. Je les rejoins tant il est l’exemple typique du film qui se satisfait de sa condition d’actionner radical, rappelant furieusement aux nouveaux qui tentent de le copier en engraissant leur proposition d’une intrigue tarabiscotée qu’il faut parfois aussi savoir se focaliser sur l’essentiel : en l’occurrence ici un personnage charismatique (Jason Pai Piao l'énervé impassible), un bodycount généreux, des prises de vue nocturnes du plus bel effet et une caméra à l’agilité diabolique pour conjuguer les deux sur bobine.


Découverte marquante pour ma part d’un film qui est à mon sens un peu trop ombragé par Story of Ricky, récréation over the top d’une violence inouïe, chérie par les amateurs de péloches complètement fêlées, alors qu’il témoignait d’un potentiel certain de son auteur. De quoi en tout cas me mettre quelques étoiles dans les yeux au point de vouloir creuser la filmographie de Lam Nai-Choi et y découvrir ses autres polars : Brothers from Walled City, Killer’s nocturne et Her vengeance.

oso
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le 16 janv. 2016

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