Avec Chasing Amy (et son incompréhensible titre français), Kevin Smith signe son film le plus intime et personnel, inspiré de plusieurs relations passées et notamment de son ex, Joey Lauren Adams, qui joue ici le rôle indirectement éponyme.
Holden, solidement campé par Ben Affleck, est l'auteur d'une série de comics potaches inspirée de Jay et Silent Bob, qu'il produit en collaboration avec son meilleur ami, Banky (Jason Lee, aussi drôle et antipathique que dans Mallrats). Lorsqu'il tombe sous le charme d'Alyssa Jones, lesbienne convaincue et libertine consommée, il aura bien du mal à gérer cette relation, d'abord amical, qu'il voudrait faire passer à la vitesse supérieure.
Si c'est plus ou moins entré dans les mœurs depuis, il était rare en 1997 de voir une comédie romantique aussi décomplexée, parlant de sexe sans ambage, et pas juste de la dimension romantique d'une relation. Et si certains dialogues embrassent avec un peu trop d'enthousiasme l'homophobie galopante de Banky, le film reste ce qui se faisait de plus progressiste à l'époque, et m'a encore semblé pertinent et bien attentionné aujourd'hui.
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À l'inverse de Clerks et de Mallrats, Chasing Amy est avant tout un drame, émaillé de comédie grâce à des dialogues bien sentis. Mais sortis de quelques conversations entre Holden et Banky, Hooper et les rares apparitions de Jay et Silent Bob, la balance penche clairement en faveur du drama.
Le film est avant tout porté par son duo de protagonistes : Alyssa est attachante et authentique. Alors qu'on aurait pu s'attendre à ce qu'elle existe principalement pour sa fonction dans le récit et la leçon qu'elle inspire à Holden, elle semble toujours être une vraie personne, avec ses envies et son passé tumultueux.
Holden, apparait d'abord comme un stéréotype d'alpha toxique, mais montrera vite ses fêlures et ses insécurités. Le film parle avant tout de son incapacité à accepter une relation avec une partenaire plus expérimentée et l'immaturité émotionnelle qui le pousse à tout foutre en l'air. Quand on connait l'histoire derrière l'écriture du film et à quel point il s'agit d'une histoire intime pour Smith, le monologue de Silent Bob n'en est que plus touchant, même si on pourra lui reprocher de manquer de subtilité.