Après Narc, joli polar ténébreux, Joe Carnahan rempile sur le même créneau, mais dans un état d’esprit différent. Les séquences un peu poussives qu’on pouvait reprocher à son précédent opus, à savoir des flashbacks au gros grain colorés à outrance ou une scène frénétique en caméra à l’épaule deviennent ici la norme : baroque, speedé, Mise à prix est une sorte d’Ocean 11 revisité par Guy Ritchie et Tony Scott. Cinéphiles orthodoxes s'abstenir.
Autant dire que les motifs de détestation peuvent abonder, et ce dès les premières minutes.
Si on le prend pour ce qu’il est, à savoir un pur exercice de style, le film peut s’avérer savoureux par instants. Il faudra bien entendu faire montre d’une certaine indulgence face aux dialogues qui lorgnent sans succès du côté de Tarantino, et d’une intrigue qui s’effondre à plusieurs reprises sous le poids de sa surenchère et de ses twists.
Le film vaut surtout pour son habileté à brasser large. Le casting, très hétérogène, compte ainsi quelques belles apparitions, et fonctionne comme un sorte de carnaval sous acide, où les rôles tous plus déjantés les uns que les autres se disputent la timbale en matière de forfanterie, entre les sadiques, les losers, les lesbiennes ou les néo-nazis, le tout dans une atmosphère vestimentaire qui lorgne aussi bien du côté de Scarface que de Mad Max.
Le récit se déroule sans temps mort, et, à quelques violinades dispensables près, nous vend ce qu’il avait promis : du fun.
A bien y réfléchir, le secret réside justement dans son rythme et dans le choix judicieux, pour de telles ambitions, d’avoir eu recours au récit choral : en faisant de la convergence l’aboutissement des quêtes, Carnahan concentre progressivement toute sa débauche visuelle autour d’un espace à la fois clos et profus, l’hôtel Casino. Et là, force est de reconnaître qu’il s’en sort avec brio pour entremêler les intervenants et varier les points de vue, sans jamais perdre de vue sa cadence frénétique.
L’abus de ce genre est certes dangereux pour la rétine : mais à dose raisonnable, sans autre jugement que celui inhérent à la maîtrise de la forme, on peut se laisser happer par ce genre de film dont le personnage principal est en réalité la caméra.