Duplicity lights
Il faut un certain temps pour mettre le doigt sur l’emprise générée par Midnight Special. Parce qu’il est accidenté, parce qu’il n’est pas exempt de défauts, le trajet qu’il propose nous embarque...
le 17 mars 2016
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1. Midnight Special explore les rapports père-fils, alors qu'ils sont confrontés à une situation extraordinaire : la dimension surnaturelle (ou nature paranormale) du fils et les pouvoirs qu'elle lui confère (en fait, j'ai tendance à penser que le film est une sublimation de la peur que des parents et leur fils de 8-10 ans peuvent éprouver lorsqu'ils comprennent peu à peu que l'enfant est atteint d'une maladie si grave que son tout proche avenir est d'aller au ciel).
2. Les manifestations paranormales sont spectaculaires (effets spéciaux très réussis dans l'ensemble).
Maintenant, avant d'aller plus loin dans ma critique, je voudrais, dans un souci de démystifier un peu le film, rappeler quelques généralités sues de tous mais souvent perdues de vue.
Le cinéma est un artisanat, un commerce, une industrie, voire (dans le meilleur des cas) un art. On fabrique des films pour gagner de l'argent. Argent qui sort des poches de ceux qui acceptent de l'échanger contre le visionnage de ces films... visionnage qu'ils font dans le but premier de se divertir, c'est à dire d'oublier, durant les 90, 120, 150 ou même 180 minutes du spectacle, leur réalité quotidienne (préoccupations ou inquiétudes du jour et du lendemain). Aller au cinéma ("se faire" un film), c'est s'offrir une tranche d'évasion, consommer par les yeux et oreilles un "rêve" conçu et mis en scène par un réalisateur (et son équipe de scénaristes, comédiens et techniciens). On est d'accord ?
Du nouveau rêve sur pellicule 35mm de Jeff Nichols, disons que le scénario est un peu abracadabrantesque, mais comme c'est un film de science-fiction, on peut difficilement le lui reprocher. On est tout de suite au coeur de l'action (évasion et cavale ou enlèvement, selon le point de vue). Il y a du rythme, c'est haletant, passionnant, intrigant. On découvre petit à petit l'étendue des pouvoirs spéciaux (paranormaux) du petit garçon Alton, fragile par ailleurs, que son père (Michael Shannon) et sa mère (Kirsten Dunst), eux-mêmes des êtres tout à fait normaux, essaient, avec l'aide de Lucas (Joel Edgerton), l'ami d'enfance du père, de soustraire à la secte religieuse ("le Ranch") au sein de laquelle le petit garçon avait été élevé jusqu'alors, en même temps qu'au FBI qui, alerté par des fuites d'informations scientifiques ultra confidentielles dont l'origine semble être "le Ranch" et plus précisément Alton, veut interroger celui-ci.
De mystérieuses et très spectaculaires "crises lumineuses" (à effets paranormaux extrêmement intenses) secouent à l'improviste le petit garçon et il en sort à chaque fois terrorisé et épuisé. Suite à l'une d'elles, Lucas exhorte Roy (le père d'Alton) : "Il est malade, il faut l'hospitaliser" et Roy lui répond : "Non, il a une mission !" (réponse que j'ai trouvée pour le moins étrange, mais peut-être était-ce une traduction maladroite du terme anglais prononcé que je n'ai malheureusement pas saisi - j'ai vu le film en VOST). Au fil de l'histoire, on découvrira en fait qu'il s'agit moins d'une mission que d'un rendez-vous avec son destin (celui d'aller vivre dans un autre monde, extra-terrestre et plus évolué que le nôtre, monde auquel Alton appartient pour on ne sait quelle raison ou auquel il est destiné).
Tel qu'il est conçu, le film, dans son final, dérape vers une science-fiction de type Spielberg (Rencontres du troisième type, 1977), un fantastique qui fait dans l'esbroufe de façon assez naïve (cet "autre monde", ça pourrait être le paradis, non ? Alton ne serait-il pas tout simplement moins un petit garçon qu'un petit ange inadapté à ce bas monde et dont le destin est de rejoindre très vite les autres anges qui "peuplent" cet autre monde au dessus du nôtre, le paradis ?) ou presque ridicule. Mais je m'égare peut-être.
En tout cas, les quatre-vingts premières minutes du film (à la fois réalistes et mystérieuses, dérangeantes) me vont davantage, parce qu'elles ne disent ni ne montrent vraiment les choses mais restent dans l'ambiguïté.
Pour conclure, la réalisation et l'interprétation du film, toutes deux de très bonne facture, m'ont tenu en haleine pendant quasiment tout le spectacle. Je ne me suis jamais ennuyé (même si, je le répète, la fin m'a semblé un peu ridicule).
Donc "8" pour "très bon film".
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2016, Les meilleurs films de Jeff Nichols et Les meilleurs films avec Kirsten Dunst
Créée
le 16 mars 2016
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