Au-delà d’offrir une suite pleinement réussie à son aîné sorti cinq ans plus tôt, Minuscule 2 : Les Mandibules du bout du monde adopte un point de vue des plus audacieux puisqu’il parvient à délaisser l’humain pour se mettre, véritablement, à échelle d’insecte. Car cette échelle ne se limite pas à la simple différence de taille : elle gagne l’entièreté de la dramaturgie qui mêle éloge de la simplicité et de l’entraide, burlesque pur et décentralisation de l’homme, réduit ici à ne camper qu’une position marginale. L’humanité, d’ailleurs exclusivement masculine, est ce géant destructeur soucieux de plier la nature au gré de ses fantaisies et besoins (ici, un complexe hôtelier pour les vacances). Face à elle se dresse Minuscule, soit un ensemble – singulier oblige – de corps disparates que les deux réalisateurs restituent dans leur grâce et leur mystère premiers. Et sous les yeux ébahis du spectateur prend vie un monde qui s’organise en totale indépendance, où l’humour ne paraît guère concerté mais, au contraire, semble couler naturellement, à l’instar de ce bateau de pirates élevé dans les airs à l’aide de ballons de baudruche. Les insectes et autres animaux *re-*poétisent le monde, subliment les décharges, les entrepôts, les halls d’aéroport. Dès lors, le geste cinématographique, inouï, trouve dans la polyphonie certaine du récit un élan libertaire, primitif. Le spectateur, lui, n’a d’autre choix que de se laisser embarquer : il doit quitter le rythme infernal des productions actuelles, abandonner ses mauvaises habitudes de spectateur lambda pour réitérer cet effort nécessaire à l’appréciation de toute œuvre d’art. L’ouverture du métrage – similaire à sa clausule, d’ailleurs – agit à la façon d’un vestiaire où se débarrasser du bruit, des images, des préoccupations du contemporain. Ce faisant, Minuscule 2 se situe dans une bulle artistique qu’il a lui-même pris soin de souffler depuis la série télévisée ; bulle en marge du monde, qui le regarde de haut non par condescendance mais par souci de se raboucher à une sensibilité supérieure. Il y a, dans ces silences et ces langages secrets, une magie du vivre-ensemble que l’on éprouve à fleur de peau et dont on ne se lassera jamais.

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le 25 juil. 2019

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