Avec une vague inspiration de films de minuits, quelques bricoles, et un noir et blanc renforçant une allure austère et peu amène à la douceur angélique, le grand prix du festival de Gerardmer, festival particulièrement appréciable, nous propose de revisiter le film de zombis tel que nous avons pu les voir régulièrement.
Le but premier est de présenter un film largement éloigné des traditionnels films d'épouvante où le zombie violent et destructeur y est remplacé par un sac de chair se mouvant de façon vaguement consciente, dans un contexte où la créature s'attache à quelques vagues sentiments de vie : nostalgie, tristesse, peur; qui semblent se mêler aux réflexes d'une actrice elle bien vivante.
Les zombis sont nos amis, il faut les aimer aussi
La conscience primitive qui anime la miss morte semble déjà la faire passer de trépas à vie, lui offrant des sentiments, une sensibilité, pourquoi pas même un peu d'espoir, loin de l'infectée brutale et violente. On se surprend même à apprécier cette pauvre fille qui fait de la peine un peu comme on aurait de la peine pour une fille tronc en total isolement sensoriel, et les évènements qu'elle va subir ne vont pas aider à renforcer cette constatation de pauvre fille transformée en animal de compagnie d'une famille pourtant a priori bien sous tout rapport mais finalement assez déviante.
T'es trop mortelle !
Une fois passée l'ambigüité de son personnage principal faussement vivant, le parti-pris esthétique d'un noir et blanc ainsi que le caractère particulier des personnages tous plus étranges les uns que les autres, concourent à dépeindre une ambiance assez oppressante, plutôt gênante et globalement plus fine que la norme, rendant hommage aux films classiques en ne dédaignant pas des moments d'agressivité fugasse, mais préférant se concentrer sur une psychologie du mort, et sa place en tant qu'entité vivante à part entière, tirant une psychothérapie d'une vie et son rapport à la société en tant que véritable nouvelle espèce animale.
5 fruits et légumes par jour
Très vite, c'est à dire au bout de quinze minutes, on comprend assez bien où veut en venir le réalisateur en proposant d'estimer différemment la vie de son personnage au travers de l'optique d'une opposition intéressante : l'homme est un zombi pour l'homme, une inversion des rôles où la miss va petit à petit devenir de plus en plus humaine, récupérant pour elle l'entend mort noyé de la famille qui se mettra dès lors à le reconnaitre comme sa propre mère, et où l'épouse de la famille, épuisée devant la perte de son enfant puis les tromperies de son mari sombrera dans une folie suffocante lui faisant perdre une partie de sa mobilité jusqu'à se mettre à gémir et à hurler comme une âme damnée en soufflant, un couteau à la main pour poursuivre la zombie devenue finalement bien plus humaine que sa maitresse dans son allure. Le film se paye même le luxe de jouer sur un court passage en couleur pour montrer avec un peu plus de force le retour à l'humanité d'une morte.
C'est étrange, elle a les yeux oranges
Au final que retenir de ce film ? que si horreur et épouvantes y restent modérés, les codes structuraux de ces genres sont bien là et plonge le tout dans une ambiance douce-amère avec son lot de dégout psychologique grâce à des personnages en complet décalage avec le comportement attendu et en jouant sur nos habitudes et surtout notre ressenti pour inverser les rôles traditionnels du film d'horreur et réussi le projet, plutôt casse-gueule, avec brio ! en ressort un film plutôt atypique, c'est un peu comme redécouvrir le film de zombi, du coté du zombi, et ça c'est très rafraichissant !