Mobile Étoile. Un titre très beau, qui émane d'une intention qui aurait pu être captivante de la part de Nadjari : travailler sur le retour du Sacré via des cantiques reprises dans un monde désormais profane. Il serait notamment précieux pour Hannah de débusquer une partition perdue, jamais numérisée ni classifiée, pour ne jamais cesser de faire vivre le sanctuaire de ces chants religieux.
La mobile étoile, c'est un air gracieux qui peuple le film de manière récurrente, écrit par Jérôme Lemonnier sur une partition originale de Fernand Halphen... Mais, scénaristiquement, cette partition n'a aucune place particulière : ce n'est pas celle qu'ils recherchent. Voilà un détail infime, mais c'est le premier symptôme de ce qui m'est apparu comme une triste confusion.
Le premier quart-d'heure me laissait espérer le développement de motifs sur lesquels le regard du cinéaste promettait un mélange de grâce et de réalisme social à la hauteur du thème pris entre l'une et l'autre. La volonté animée de faire revivre l'esprit sacré des cantiques tout en les réinvestissant d'une modernité inévitable ; les embûches fatales que la société oppose aux artistes, en recherche de locaux et de subventions ; le jeu des deux familles, entre le trio de sang et le sextet de c(h)oeur.
Or, il est douloureux de voir qu'au fur et à mesure, ces espoirs s'effritent de trop se maintenir : aucun des enjeux ne gagne à l'approche type "réalisme social" (dont de plus, selon Nadjari, les scènes sont partiellement improvisées), ni à celle du "film musical" (pour laquelle les acteurs ont pourtant donné de leur personne pour être au niveau de la représentation musicale). En effet, une partie non-négligeable du film prendra la forme de sortes de captations, enregistrant des morceaux entiers : cela occasionne quelques beaux moments, mais occupe finalement une place exaspérante dans l'ensemble du film.
Les fils du scénario qui étaient tissés deviennent rigides et, cela me fait mal de le dire, sombrent à mes yeux dans une absence totale d'intérêt. On se retrouve progressivement devant la success story d'une chorale dont tout, des réussites aux brouilles, se fige de plus en plus dans des stéréotypes gênants. Et lorsque le jeu n'est pas téléphoné (pourtant les acteurs sont loin d'être mauvais), c'est leurs personnages qui sont incohérents dans le récit.
Peut-être s'agit-il d'une erreur - voir Mobile Étoile sous cette lumière ; pour sûr, l'observation des personnages se poursuit tout au long du récit ; mais l'absence de point de vue, qui peut être une force, fait vite oublier les éléments intéressants, que l'on n'arrive plus à percevoir au fil d'un scénario sans réel choix non plus. Lorsque la salle de cinéma, dans laquelle je me trouvais, s'esclaffe alors qu'une scène dramatique se déroule, c'est cruel mais ce n'est pas forcément méprisant : c'est simplement la preuve que, si ce rire n'est pas voulu, quelque chose s'est décroché dans la construction du film et l'infusion des personnages, des thèmes, de leurs intentions - et que le spectateur que je suis par exemple n'arrive qu'à voir l'artifice parfois un peu grotesque qui transpire de situations malheureusement inertes.
Pourtant, ses précédents films (au vu de simples extraits) semblent promettre bien davantage en terme d'histoires et d'idées de mise en scène...