Je trouve le cinéma de Jean Rouch vraiment intéressant, à défaut de forcément trouver tous ses films intéressants en eux-même. En fait son idée de cinéma qui consiste à faire du cinéma en improvisant avec des acteurs amateurs pour leur faire raconter leur vie, leurs rêves, je trouve ça vraiment pertinent puisque ça permet de donner la parole d'une certaine manière à des gens qui ne l'ont pas forcément. Mais le souci c'est que ça peut aller nulle part comme dans le cas présent.
En fait Jean Rouch essaye donc de nous montrer dans cette demi-fiction la vie d'Eddie Constantine et d'Edward G. Robinson deux nigériens qui ont immigrés dans la banlieue d'Abidjan. Forcément on note les références cinématographiques, le fait qu'en ville on s'intéresse au cinéma américain, aux combats de boxe et qu'en voyant les bateaux qui vont aux quatre coins du monde on se prête à rêver d'avoir une femme dans chaque port.
Et pour ce rapport entre les rêves de ces fils des campagnes africaines qui font des milliers de kilomètres pour se retrouver en ville et la réalité qui n'est pas forcément toujours très enviable, le film vaut le coup d'être vu.
Cependant techniquement c'est totalement à la ramasse. Je veux bien que ça soit improvisé, mais l'étalonnage des couleurs change d'un plan à l'autre dans la même scène, les dialogues juste inaudibles puisqu'il s'agit uniquement, j'ai l'impression, d'une voix off ratée où les acteurs racontent les scènes et racontent les scènes que l'on a devant les yeux.
Donc vu que l'image en elle-même ne veut rien dire c'est assez peu intéressant et ça donne un film réellement verbeux, avec des acteurs qui ont un accent assez incompréhensible et avec un DVD qui n'offre pas de sous-titres... Donc en plus c'est pénible à suivre rien que pour ça.
Après, le film a été tourné juste quelques années avant l'indépendance de la Côte d'Ivoire et c'est assez marrant de voir donc des gens défiler avec le drapeau français, dire qu'ils sont courageux, qu'ils se sont battus pour la France, le tout sans aucun ressentiment envers « l'occupant » français. Et pour ces quelques images de la banlieue d'Abidjan, de ses plages, de ses infrastructures à la veille de la décolonisation, il faut voir le film, ça donne une image de la fin de la période coloniale.